Le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) a récemment publié une série de documents chinois ayant fait l'objet de fuites qui révèlent l'ampleur effroyable du nettoyage culturel de la minorité ouïghoure du Xinjiang par Pékin. Ces documents qui portent le nom de China cables ont été rejetés par la Chine comme étant des faux.
Lavage de cerveau des Ouïghours
Un des documents est une note de service de 9 pages datant de 2017, apparemment émise par Zhu Hailun, le secrétaire adjoint du Parti communiste chinois (PCC) à l’époque. Zhu était responsable de la sécurité du Xinjiang et avait apparemment envoyé les mémos à ceux qui dirigeaient les camps d’internement où étaient détenus les Ouïghours.
« Les étudiants doivent avoir une place fixe au lit, dans les files d’attente, un siège fixe en classe et un poste fixe pendant le travail de qualification, et il est strictement interdit de changer cela... Mettre en place des normes comportementales et des exigences disciplinaires pour se lever, faire l’appel, se laver, aller aux toilettes, organiser et faire le ménage, manger, étudier, dormir, fermer la porte, etc », indique le document (BBC).
Le mémo demande aux responsables de veiller à ce que l’étude du mandarin soit une priorité absolue pour les détenus. Il exige une surveillance complète des salles de classe et des dortoirs. Les Ouïghours doivent être encouragés à se « repentir » afin de prendre conscience de la nature « illégale, criminelle et dangereuse » de leur activité passée. Si l’un des détenus montre des signes de résistance au lavage de cerveau, les responsables sont chargés de veiller à ce que la «transformation par l’éducation » soit réalisée.
La note de service exige la surveillance totale des salles de classe et des dortoirs. (Image : Capture d’écran / YouTube)
Les prisonniers du camp sont soumis à un système de points. S’ils acceptent l’idéologie communiste, respectent la discipline du camp, étudient et s’entraînent dur selon les instructions, ils gagnent des points. Ceux qui obtiennent le nombre de points requis sont autorisés à rétablir le contact avec leur famille une fois libérés du camp. Les détenus ayant obtenu un nombre de points inférieur sont punis.
L’ampleur des opérations de répression contre les Ouïghours est énorme. Un mémo parle de 15 000 personnes envoyées dans des camps dans tout le Xinjiang en une seule semaine. Un autre document décrit comment le système de surveillance en ligne a repéré près de 1,8 millions de personnes simplement pour avoir utilisé une application de partage vidéo sur leurs smartphones. Pékin a ensuite ordonné une enquête sur 40 000 de ces personnes signalées, conseillant aux responsables de les envoyer suivre une « formation soutenue » au cas où elles resteraient suspectes.
Même les Ouïghours vivant à l’étranger ne sont pas épargnés par la persécution venant de Pékin. Les documents révèlent des instructions pour suivre les Ouïghours installés à l’étranger et pour arrêter ceux qui possèdent la citoyenneté étrangère. Il est donc fort possible que les ambassades chinoises du monde entier participent à la surveillance et à la répression des Ouïghours vivant à l’étranger.
Tenir tête à la Chine
Les documents ayant fait l’objet d’une fuite ont déclenché de fortes réactions au niveau international. Les organisations de défense des droits de l’homme ont souligné que ces documents prouvent que la communauté internationale doit agir de manière stricte à l’égard du traitement inhumain que Pékin réserve aux minorités. Le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, s'est également montré très critique envers la Chine et a demandé à Pékin de libérer les Ouïghours détenus.
Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a été très critique envers la Chine et a demandé à Pékin de libérer les Ouïghours détenus. (Image : Capture d’écran / YouTube)
« Ces rapports concordent avec un ensemble de preuves de plus en plus nombreuses et écrasantes selon lesquelles le Parti communiste chinois commet des violations des droits humains et des abus contre des personnes en détention de masse », a-t-il déclaré dans un communiqué (Radio Free Asia).
Les autorités chinoises ont carrément nié la validité de ces documents. Elles ont accusé les puissances occidentales de tenter de discréditer la Chine dans le but de s’ingérer dans les affaires intérieures du pays et de bloquer les activités « antiterroristes » en cours dans le Xinjiang. Malgré ces arguments, la Chine continue de refuser aux enquêteurs étrangers indépendants l’accès nécessaire pour évaluer la situation réelle dans la région du Xinjiang.
Rédacteur Fetty Adler
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