Le Président de la République Emmanuel Macron, s’est rendu en Chine, du 4 au 6 novembre 2019, pour une visite officielle, en vue de négocier des accords commerciaux, parler des questions climatiques et évoquer les droits de l’homme.
De retour en France, il a fait part à la presse de son sentiment d’avoir accompli sa mission. Il semblerait que «l’opération séduction» ait porté ses fruits.
Toutefois, s’il apparaît que les intérêts financiers de la France ont été largement débattus et que certains résultats devraient rapidement être visibles, la question des droits de l’homme en Chine n’a cependant pas eu le même retentissement. En effet, malgré la situation particulièrement inquiétante concernant les droits humains dans l’Empire du Milieu, avec la crise de Hong Kong, la question des «camps d’éducation politique» détenant plus d’un million de Ouighours, les atteintes à la liberté de croyance qui touchent un nombre très important de musulmans, de catholiques et de pratiquants de Falun Gong, gravement persécutés, Monsieur Emmanuel Macron est resté discret sur son entretien privé avec son homologue chinois.
Précisons que le Président chinois Xi Jinping avait fait savoir au préalable, que la problématique des droits de l’homme en Chine, ne pourrait pas faire l’objet d’une intervention publique, mais plutôt d’une réunion privée entre les deux dirigeants.
L’objectif d’Emmanuel Macron visait avant tout à pousser la Chine à ouvrir davantage son marché aux entreprises étrangères. Image : (FB Emmanuel Macron)
Des résultats jugés positifs lors du déplacement du Président français en Chine
L’objectif d’Emmanuel Macron visait avant tout à pousser la Chine à ouvrir davantage son marché aux entreprises étrangères et à permettre ainsi une coopération réelle avec l’Europe. Le Chef de l’Etat français a d’ailleurs fait savoir, à l’occasion d’un de ses discours, que le France et l’Europe avaient besoin «d’une grande ouverture de la Chine et de son marché».
Emmanuel Macron était accompagné d’une délégation de patrons des principales entreprises françaises, et de ministres. selon l’AFP, l’objectif du Chef de l’Etat était basé sur «la coopération commerciale, la signature d’un accord européen sur les indications géographiques (IGP), les échanges culturels, le climat… sans oublier les sujets sensibles à aborder avec le président chinois»
Cet échange Europe-Chine, placé dans le cadre de l’ouverture économique, semble avoir été porteur pour la France, avec l’ouverture d’un partenariat dans les domaines de la technologie, du changement climatique et de la biodiversité. Le Gouvernement chinois a fait savoir à la presse, que lors de la visite d’Emanuel Macron, des contrats d’un montant total de 15 milliards de dollars, concernant «l’aéronautique, les énergies propres, l’agro alimentaires, la finance et l’électricité», avaient été conclus. Il a par ailleurs déclaré que la Chine s’était invitée à participer activement à l’opération française d’exploration lunaire en 2023.
Ce financement de 15 milliards de dollars annoncé par Pékin n’a pas été confirmé par l’Elysée, qui ne souhaite pas se prononcer là-dessus. Sachant, par expérience, que les commandes avec la Chine peuvent ne pas être suivies d’effet, le Président de la République fait preuve de prudence.
Même si des signes d’entente entre Xi Jinping et Emmanuel Macron étaient visibles, selon une source en coulisse, lorsque la question des droits de l’homme a été évoquée en privé avec Xi Jinping, ce dernier est resté de marbre, laissant son interlocuteur dans un monologue sourd. Il est bon de rappeler qu’à ce jour, aucun pays étranger au monde n’a pu obtenir de résultats probants sur les libertés fondamentales en Chine.
Kenneth Roth, président de l’association de défense des droits de l’homme Human Rights Watch (HRW), et ancien procureur des États-Unis pour le sud de l'État de New York, avait saisi préalablement le Chef de l’Etat français. (Image : Cc-by-3.0)
Les conclusions négatives des ONG sur le voyage d’Emmanuel Macron en Chine
Kenneth Roth, Président de l’association de défense des droits de l’homme Human Rights Watch (HRW), et ancien procureur des États-Unis pour le sud de l'État de New York, avait saisi préalablement le Chef de l’Etat français avant son déplacement en Chine, pour lui demander d’interpeller le Président Xi Jinping sur les arrestations des Ouïghours, la situation de la veuve du Prix Nobel Lui Xia, actuellement assignée à résidence, la libération sans conditions des défenseurs des droits humains détenus injustement, mais aussi sur le dénouement de la crise de Hong Kong, les atteintes aux liberté religieuses, et sur les discriminations sociales et économiques.
De retour en France, Emmanuel Macron a refusé de s’exprimer publiquement sur ces questions. Les différentes ONG qui ont suivi de près le déroulement des échanges entre la France et la Chine, font état d’une attitude fébrile de la France, contrairement à d’autres pays comme l’Allemagne et la Grande Bretagne qui ont affirmé un positionnement critique et public contre les atteintes aux droits de l’homme en Chine.
Pour les ONG et les associations humanitaires, face aux intérêts économiques et financiers, la défense et le respect des droits de l’homme semble ne plus avoir d’importance.
Le directeur d’Human Rights Watch a cité, dans une interview, l’attitude noble de Madame Angela Merkel, qui avait poussé les autorités chinoises à libérer la veuve du dissident chinois Liu Xiaobo prix Nobel de la Paix, et lui permettre de quitter la Chine.
Kenneth Roth a déclaré «Le courage du Président Macron, de faire face aux abus perpétrés contre des personnes uniquement en raison de leur religion, de leurs opinions pacifiques ou de leurs aspirations démocratiques, ne devrait pas faiblir lorsqu'il s'agit de la Chine». «Ne pas montrer que ces abus ont un coût, ne fera qu’encourager le gouvernement de Xi à continuer de les commettre.»
Cette situation s’avère l’une des plus embarrassantes et préoccupantes pour le pays des droits de l’homme.
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