Le 3 avril, le gouvernement taliban d’Afghanistan a annoncé l’interdiction de la culture du pavot dans le pays. Quiconque violera cette décision sera poursuivi et puni.
l’Afghanistan est le plus grand producteur mondial d’opium. Suite à l’aggravation de la crise économique dans le pays en raison de l’interruption de l’aide internationale, la demande des Afghans de travailler dans le secteur de la drogue, qui génère de gros bénéfices, a augmenté.
L’interdiction des drogues par les Talibans
Le dimanche 3 avril, le chef taliban Haibatullah Akhunzada a annoncé l’interdiction de la production, du trafic et de la consommation de plantes narcotiques, dont le pavot à opium, en Afghanistan.
« Conformément au décret du dirigeant suprême de l’Émirat islamique d’Afghanistan, tous les Afghans sont informés qu’à partir de maintenant, la culture du pavot est strictement interdite dans tout le pays », a déclaré Haibatullah Akhunzada.
« Si quelqu’un enfreint le décret, la culture sera immédiatement détruite et le contrevenant sera traité conformément à la charia », a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse à Kaboul.
Cette interdiction rappelle celle adoptée par le précédent régime taliban à la fin des années 1990, avant son éviction en 2001. Par la suite, le pavot est devenu la principale source de revenus des agriculteurs du pays, malgré les efforts internationaux pour détruire cette drogue.
Avec le retour des Talibans au pouvoir en 2021, le gouvernement a mis en place un contrôle répressif avec des milliers de civils afghans expulsés de force de leurs maisons et menacés de famine.
Selon des sources talibanes, une opposition à l’interdiction est fortement attendue de la part de « certains éléments au sein du groupe », a rapporté Reuters.
La détresse des producteurs d’opium
Bien que destinée à apaiser la communauté internationale, cette interdiction présente des failles, notamment en ce qui concerne les revenus de la population.
En 2021, avant la prise de pouvoir par les Talibans, l’Afghanistan produisait plus de 6 000 tonnes d’opium. Le pays produit plus d’opium que tous les autres pays producteurs d’opium réunis.
Selon un rapport de la National Public Radio (NPR), une interview de 2016 avec le gouverneur afghan Hayatullah Hayat de Helmand indiquait que la production de pavot de l’Afghanistan représentait plus de 90 % de l’héroïne mondiale. 80 à 90% de l’héroïne consommée en Europe occidentale provient de l’Afghanistan.
Un rapport des Nations unies (ONU) datant de 2021 a également montré que les opiacés génèrent entre 1,8 et 2,7 milliards de dollars, ce qui représente 7 % du PIB de l’Afghanistan. Il est également suggéré que « les chaînes d’approvisionnement en drogues illicites à l’extérieur de l’Afghanistan » génèreraient davantage de revenus.
Un rapport de l’ONU datant de 2020, révèle également que la superficie des terres consacrées à la culture du pavot avait augmenté de 37% en 2020 par rapport à 2019, pour atteindre 224 000 hectares.
Selon un rapport de l’inspecteur général spécial pour la reconstruction de l’Afghanistan (SIGAR), les États-Unis ont même dépensé « près de 9 milliards de dollars en efforts de lutte contre les stupéfiants depuis 2002 », mais cela n’a pas suffi à empêcher la culture de l’opium de se développer dans le pays, bien que plus difficile en raison de l’insécurité.
Le pavot est la principale source de revenus de millions d’agriculteurs et d’ouvriers journaliers dont la récolte peut leur rapporter jusqu’à 300 dollars par mois, alors que les autres drogues ne seraient « pas rentables ». Cet argent sert à l’achat de produits de base comme la farine et l’huile de cuisine.
Un agriculteur anonyme du Helmand a déclaré que suite aux rumeurs selon lesquelles les Talibans étaient sur le point d’interdire la culture, le prix du pavot avait doublé, ajoutant qu’il avait besoin de cultiver le pavot pour nourrir sa famille.
Comme l’indique le site de la télévision Al-Jazeera, alors que le pays est déjà « en chute libre », l’interdiction de la culture du pavot, s’ajoutant au retrait des forces étrangères, ne fera qu’aggraver la crise humanitaire. L’opium a permis à nombre d’Afghans, parmi les plus pauvres, de subvenir à leurs besoins les plus élémentaires.
Le 31 mars, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a lancé un appel à l’aide humanitaire, déclarant avoir besoin de 4,4 milliards de dollars pour venir en aide au peuple afghan, ajoutant que certains « vendent déjà leurs enfants et des parties de leur corps pour nourrir leur famille ».
On ignore actuellement ce que les Talibans utiliseront comme substitut à la culture du pavot à opium et des autres plantes narcotiques.
Rédacteur Fetty Adler
Collaboration Jo Ann
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