Le système de santé de l’Ontario, au Canada, serait au bord de l’effondrement. Les professionnels de santé tirent la sonnette d’alarme sur la détérioration des conditions dans les hôpitaux.
« Ce qui se passe clairement, c’est l’effondrement du système de santé actuel », a déclaré à CTV News Le 15 juin, le Dr Katharine Smart, présidente de l’Association médicale canadienne (AMC). « Nous ne voyons pas de volonté politique de prendre cela au sérieux ».
« Il ne semble pas vraiment y avoir de solutions à court terme, ce qui est vraiment inquiétant », a-t-elle indiqué, ajoutant : « Alors en ce moment, ce que nous avons, ce sont des centaines de milliers de Canadiens qui souffrent de manière très réelle, qui souffrent, qui ne peuvent pas obtenir de services et qui font la queue dans les services d’urgence, qui ne peuvent pas obtenir un médecin de famille. Le système s’effondre autour de nous ».
La pandémie de Covid-19 a mis à rude épreuve le système de santé canadien et selon le Dr Katharine Smart, la situation ne montre aucun signe d’atténuation, et pourrait même s’aggraver.
Elle prévient que « la pression sur l’ensemble du système » est énorme, que la file d’attente pour une chirurgie s’allonge, que les salles d’urgence sont débordées et que les soins primaires posent des problèmes constants.
Des problèmes qui s’aggravent
Selon la Dr Katharine Smart, l’augmentation du nombre de patients serait due à l’émergence d’un certain nombre de virus circulant parmi la population, et pas seulement à la Covid-19.
La situation est aggravée par une grave pénurie de personnel, isolés chez eux en raison des mesures liées à la Covid-19. « Nous constatons que beaucoup de membres du personnel sont en congé de maladie », a déclaré le Dr Katharine Smart à CTV News, ce qui entraîne une énorme accumulation de patients « qui se présentent aux soins et dont les problèmes médicaux ont été négligés pendant la pandémie », a-t-elle ajouté.
Les patients qui ont évité de se rendre dans les cabinets médicaux et les salles d’urgence pendant la pandémie submergent maintenant le système et présentent des maladies à un stade plus avancé, nécessitant plus de ressources.
La Dr Katharine Smart a par ailleurs prévenu que la situation en ce qui concerne les soins primaires, gérés par un médecin de famille, se détériore. Les médecins sont moins enclins à pratiquer la médecine familiale et les patients n’ont d’autre choix que de se présenter dans les salles d’urgence au Canada.
« Tous ces facteurs exercent une pression énorme sur nos services d’urgence », dit-elle.
Des centaines de milliers de procédures retardées
Selon CTV News, 700 000 procédures médicales ont été retardées pendant la pandémie et Le nombre de chirurgies a diminué de près de 600 000 au cours des 22 premiers mois de la pandémie par rapport à 2019.
Lorsqu’on lui demande combien de temps ces retards vont durer, la Dr Katharine Smart répond : « Je pense que ce que nous voyons, c’est que les gens projettent des années pour rattraper ce retard, parce que bien sûr les patients continuent d’arriver. Donc cette file d’attente s’allonge, elle ne se réduit pas. »
« Il faudra des ressources importantes pour, bien sûr, être en mesure d’aborder ces deux choses simultanément et s’assurer de rattraper cette accumulation de patients », a-t-elle ajouté.
Selon la Dr Katharine Smart, ce qui peut paraître le plus surprenant aux yeux des Canadiens, c’est que les temps d’attente les plus longs pour les soins de santé, concernent les enfants. « Les enfants ont les temps d’attente les plus longs pour tout », a-t-elle dit, y compris pour l’imagerie médicale, la chirurgie, la santé mentale et les services d’urgence, ce qui l’amène à conclure que les enfants sont les plus touchés par le chaos.
C’est absolument horrible
En Ontario, où résident environ 13,6 millions de Canadiens, les travailleurs de santé affirment que les salles d’attente des d’urgence « explosent ».
« C’est absolument horrible. Il n’y a pas d’autres mots pour le décrire », a déclaré Angela Preocanin, de l’Association des infirmières et infirmiers de l’Ontario (ONA), à Global News.
« Certains hôpitaux dans le GTA (Greater Toronto Area) fonctionnent avec 60 % du personnel et une capacité de 300 à 400 % », a-t-elle déclaré.
Selon l’ONA, plusieurs facteurs sont à l’origine du chaos qui règne dans les salles d’urgence, notamment des problèmes de capacité qui existaient bien avant la pandémie.
Le Dr Kashif Pirzada, médecin urgentiste à Toronto, a déclaré à Global News qu’un grand nombre des patients qui envahissent les salles d’urgence cherchent à être orientés vers des spécialistes et à bénéficier d’autres interventions médicales non urgentes, ce qui aggrave la situation.
« Vous avez des gens qui ont des problèmes qui sont urgents pour eux. Ce ne sont pas vraiment des urgences, mais ils passent entre les mailles du filet. Une personne qui a un problème d’articulation ne peut consulter personne… Elle vient nous demander de l’aide », a-t-il expliqué.
Le retard entraîne ce que l’ONA appelle des « soins de santé de couloir », où les patients sont traités dans des zones non traditionnelles de l’hôpital, comme des espaces de stockage et des auditoriums, tandis que les ambulanciers attendent des heures pour décharger les patients nécessitant des soins urgents.
« Les patients ne peuvent pas être transférés dans des lits parce qu’il n’y a pas de lits aux étages, alors dans les unités, ils ouvrent des salons pour les patients, et ils commencent à soigner les patients dans les salons », a déclaré Angela Preocanin à Global News.
Des infirmières débordées
L’ONA est particulièrement préoccupée par le ratio toujours plus élevé entre le nombre de patients et celui des infirmières. L’association a déclaré que dans certains cas, une seule infirmière pouvait prendre en charge jusqu’à 30 patients en même temps simultanément, ce qui est loin du ratio recommandé d’une infirmière pour 5 patients.
France Gelinas, qui était porte-parole du NPD en matière de santé avant les récentes élections canadiennes, a déclaré à Global News : « il n’y a pas de place dans les soins de santé pour qu’une infirmière se retrouve avec 30 patients. Vous ne serez jamais en mesure de fournir des soins de qualité avec de tels ratios. »
Alors que le gouvernement provincial tente de s’attaquer au problème en adoptant des mesures visant à retenir le personnel infirmier, en augmentant le nombre de lits dans les hôpitaux, et en faisant construire ou moderniser des hôpitaux, les travailleurs de la santé de première ligne réclament une solution à brève échéance qui apportera un soulagement immédiat.
Le Dr Kashif Pirzada a déclaré que le système de santé canadien n’est pas conçu pour supporter une pression constante et a prévenu que les conditions actuelles entraîneront davantage d’épuisement chez les travailleurs de la santé qui se préparent déjà à une autre vague de Covid-19 cet automne.
« Le vrai test sera à l’automne, lorsque les gens retourneront à l’intérieur, lorsque nous verrons une autre saison de Covid, une autre saison de grippe », a-t-il déclaré à Global News, ajoutant : « j ’ai vraiment peur de voir ce qui se passera alors. »
Rédacteur Fetty Adler
Collaboration Jo Ann
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