Selon un rapport de CNN du 14 juin, une fuite de gaz radioactif a été détectée dans l’un des réacteurs de la centrale nucléaire chinoise de Taishan, dans la province de Guangdong, à proximité de Hong Kong. L’entreprise française Framatome, une filiale d’EDF, qui a participé à la construction des deux réacteurs EPR de la centrale, a alerté le gouvernement américain des problèmes émergents.
Selon le rapport de CNN, intitulé : Exclusive : US Assessing Reported Leak at Chinese Nuclear Power Facility, la société Framatome, qui détient une participation de 30% dans la centrale nucléaire de Taishan, avec l’entreprise d’État chinoise CGN, a pris contact avec le gouvernement américain dès la fin du mois de mai.
Le 3 juin, Framatome aurait de nouveau contacté le ministère de l’énergie, « avertissant les responsables américains que le réacteur EPR numéro 1 de Taishan présente un risque radioactif imminent », et soumettant une demande de dérogation qui leur permettrait de « répondre à une problématique de sécurité urgente ».
CGN est l’une des nombreuses entreprises d’État du Parti communiste chinois (PCC) figurant sur la liste noire des entités sanctionnées par le Pentagone, pour ses liens avec l’Armée populaire de libération.
David Fishman, analyste économique au Lantau Group, a expliqué comment la liste noire du Pentagone a contribué à attirer l’attention du public sur cette question, sur Twitter : « Taishan appartient à CGN, qui figure sur la liste noire américaine. Il est donc normalement interdit de transférer des informations ou des données techniques d’origine américaine à CGN. Une dérogation peut toutefois être obtenue pour des raisons de " sécurité opérationnelle ", ce qui est la demande de Framatome. »
« Ils font probablement une demande parce que soit les informations qu’ils s’apprêtent à transférer proviennent des États-Unis, soit ils ne veulent pas avoir d’impact sur leurs affaires aux États-Unis en travaillant avec CGN sans une transparence totale. Probablement les deux en fait ».
Le DOE a cependant ignoré Framatome, ce qui a poussé l’entreprise à faire un nouveau suivi le 8 juin dans un mémo, qui déclarait avec urgence : « La situation constitue une menace radiologique imminente pour le site et pour le public et Framatome demande de toute urgence la permission de transférer les données techniques et l’assistance qui peuvent être nécessaires pour remettre la centrale en fonctionnement normal. »
Selon CNN, qui dit être en possession du mémo, Framatone a contacté l’administration Biden pour signaler qu’« une agence gouvernementale chinoise continuait à augmenter ses limites sur la quantité de gaz qui pouvait être libérée en toute sécurité de l’installation sans la fermer ».
CNN dit avoir interrogé le DOE au sujet de la levée par la Chine des limites réglementaires autour de la zone, mais n’a pas reçu de réponse.
Framatone craignait que le Parti ne relève à nouveau les limites réglementaires afin d’empêcher l’arrêt de la centrale, « comme pour maintenir le réacteur qui fuit en fonctionnement malgré les préoccupations en matière de sécurité pour la population environnante », a déclaré CNN à propos du contenu du mémo.
L’entreprise française a déclaré que l’Administration nationale de la sûreté nucléaire chinoise avait multiplié par plus de 2 la limite fixée pour les rejets de gaz rares dans l’environnement, ajoutant qu’au 30 mai, les rejets de gaz radioactif du réacteur de Taishan correspondaient déjà à 90% de la limite annuelle.
Dans une déclaration à l’AFP, EDF a tenté de présenter la crise comme un « problème de performance » et a déclaré : « Selon les données disponibles, la centrale fonctionne dans les limites des paramètres de sécurité ».
EDF a admis qu’il y avait une « augmentation de la concentration de certains gaz rares dans le circuit primaire du réacteur n° 1 », tout en affirmant qu’une fuite de gaz « est un phénomène connu, étudié et prévu dans les procédures d’exploitation des réacteurs. »
CNN a interviewé une ancien scientifique du laboratoire national de Los Alamos du nom de Cheryl Rofer, qui a déclaré que la fuite de gaz de fission était en fait une cause sérieuse d’inquiétude, « S’ils ont une fuite de gaz, cela indique qu’une partie de leur confinement est brisée. »
« Cela indique aussi que certains des éléments combustibles pourraient être brisés, ce qui serait un problème plus grave. »
« Ce serait une raison pour arrêter le réacteur et il faudrait alors le recharger en combustible », a déclaré Cheryl Rofer.
Selon un article publié sur Live Science et rédigé par Wu Xuejian, professeur adjoint de physique à l’université Rutgers, la centrale de Taishan, qui abrite deux réacteurs, d’une puissance de 1 750 MW chacun, est l’une des plus puissantes au monde.
Selon l’AFP, ces réacteurs à eau pressurisée de 3e génération appelés EPR sont une nouvelle conception qui a « fait l’objet d’années de retard dans des projets européens similaires en Grande-Bretagne, en France et en Finlande. »
La CGN a déclaré que le 10 juin, le réacteur 2 avait fait l’objet d’une maintenance à la suite d’une « révision majeure » selon Reuters. L’opération était la première du genre depuis la mise en service de la centrale en 2019.
CNN indique qu’un porte-parole d’EDF a admis plus tard que « la dégradation du logement des barres de combustible » était la cause de la fuite, notant que le logement des barres de combustible était le premier des trois dispositifs de protection mis en place avant que les barres ne soient exposées à l’atmosphère libre.
Le porte-parole a également noté que « le risque d’une fuite potentielle dans le logement des barres a été discuté pour la première fois à la suite d’un arrêt de rechargement planifié en octobre 2020, après que des mesures initiales aient conduit à soupçonner un " manque d’étanchéité " dans les logements. »
EDF a également admis qu’ils n’ont actuellement « aucune information concernant l’origine de la dégradation du logement des barres », bien qu’ils soient partie prenante à hauteur de 30 % dans le projet.
CNN a également noté que ses contacts au sein du Parti communiste à Pékin et à Guangdong, ainsi que l’ambassade de Chine à Washington, sont restés muets sur la crise.
Rédacteur Fetty Adler
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