Un nombre record de migrants appréhendés à la frontière américano-mexicaine, le 20 août 2022. Le gouverneur du Texas, Gregg Abbot, a invoqué les « clauses d’invasion » pour justifier le déploiement de véhicules blindés à la frontière, alors que l’État se bat contre les cartels mexicains. (Image : Capture d’écran / YouTube)
L’État du Texas a pris la décision d’envoyer des véhicules blindés de transport de troupes pour défendre la frontière sud du pays après que le gouverneur Greg Abbot ait invoqué les « clauses d’invasion » de la Constitution du Texas et des États-Unis pour limiter l’immigration.
Greg Abbot a rendu publique la déclaration d’invasion dans un message posté le 15 novembre sur son compte Twitter, dans lequel il annonçait le déploiement de la Garde nationale et du département de la sécurité publique du Texas pour arrêter, repousser et renvoyer à la frontière les migrants illégaux.
I invoked the Invasion Clauses of the U.S. & Texas Constitutions to fully authorize Texas to take unprecedented measures to defend our state against an invasion.
I'm using that constitutional authority, & other authorization & Executive Orders to keep our state & country safe: pic.twitter.com/2Jt5HEMgp5
Greg Abbot a en outre déclaré qu’un mur frontalier serait construit, que des canonnières seraient déployées et que les cartels de la drogue mexicains seraient officiellement considérés comme des organisations terroristes étrangères.
Le 18 novembre, le Texas Tribune a rapporté dans un article coécrit avec Military Times que l’administration Abbot se préparait à déployer des véhicules blindés de transport de troupes M133 datant de l’époque du Vietnam à dix endroits de la frontière avec le Mexique.
L’article, qui qualifiait de « juridiquement douteuse » l’invocation par Greg Abbot des clauses d’invasion, ajoutait que 50 soldats seraient formés à la conduite de ces véhicules.
Texas Military Department service members work side by side with the Texas Department of Public Safety & other law enforcement to stop illegal activities from crossing the Texas-Mexico border.
« Les véhicules blindés de transport de troupes comme le M113 sont conçus pour transporter des troupes d’infanterie sur les champs de bataille modernes aux côtés des chars », explique la Tribune. « Ils peuvent être équipés d’une gamme d’armes : mitrailleuses lourdes, lance-grenades, missiles antichars ou même de gros canons similaires à ceux montés sur les chars ».
« On ne sait pas quelles armes, le cas échéant, seront sur les M113 de la Garde du Texas à la frontière », ont précisé les auteurs.
Le média a également noté que le véhicule blindé M113 se caractérise par sa résistance aux balles et aux petites explosions, et qu’il est équipé de chenilles au lieu de pneus pour pouvoir traverser des terrains difficiles.
Lutter contre le niveau record d’immigration illégale
Le département militaire du Texas a abordé la question dans une déclaration écrite adressée aux médias : « ces actions font partie d’une stratégie plus large visant à utiliser tous les outils disponibles pour lutter contre le niveau record d’immigration illégale. »
Les rédacteurs ont semblé ne pas comprendre pourquoi des véhicules de type militaire étaient déployés, apparemment parce qu’ils ont assimilé leur déploiement à une micro-agression envers les demandeurs d’asile eux-mêmes.
Présenter les demandeurs d’asile comme des criminels violents
Cette décision n’a pas surpris Fernando García, directeur exécutif et fondateur du Border Network for Human Rights, qui a déclaré que Greg Abbott « tente de justifier le récit de l’invasion en présentant les demandeurs d’asile et les migrants en quête d’opportunités comme des criminels violents ».
Pourtant, ni le Texas Tribune ni le Military Times n’ont mentionné, ne serait-ce qu’une seule fois, les cartels de drogue qui mènent des opérations de trafic d’êtres humains et de drogue le long de la frontière.
En juin, le New York Post a rapporté que les cartels exploitaient le chaos à la frontière pour envoyer aux États-Unis des passeurs de drogue (mules), transportant du fentanyl.
« Les trafiquants transportent régulièrement du fentanyl à l’aide de " mules ", des passeurs mexicains qui traversent la frontière à toute vitesse et déposent des sacs à dos chargés d’opioïdes à un endroit prédéterminé du côté américain, ou qui se mettent en relation avec des trafiquants du côté américain qui transportent ensuite le fentanyl à travers le pays », indiquait l’article.
La photo d’un sac de fentanyl de la longueur d’un stylo récupéré à l’intérieur du cadavre d’une femme « routarde » près de la frontière d’El Paso, et fournie par les agents de contrôle des frontières, accompagnait cette citation.
En juillet 2021, Vision Times a fait état du lien entre la Triade chinoise, une branche mafieuse du Département du travail du Front uni du Parti communiste chinois (PCC), et les cartels de drogue mexicains engagés par la Triade pour importer aux États-Unis, via la frontière entre les États-Unis et le Mexique, du fentanyl fabriqué dans des usines de Chine continentale.
En août 2021, un lanceur d’alerte du ministère de la Sécurité intérieure a contacté Project Veritas, une association de journalistes d’investigation, pour lui fournir des documents montrant que les membres des cartels figurant sur la liste noire exploitaient les failles du processus d’immigration des demandeurs d’asile non seulement pour se retirer de la liste noire, mais aussi pour réclamer la tutelle d’enfants migrants orphelins.
Cet état de fait est un business en plein essor. En juillet 2022, le New York Times a admis que, selon l’agence Homeland Security Investigations, l’économie illicite du trafic d’êtres humains et de drogues le long de la frontière s’était multipliée, passant d’une valeur de 500 millions de dollars en 2018 à 13 milliards de dollars au moment de la rédaction du présent rapport.
De plus, les cartels sont directement en guerre contre les forces de l’ordre et l’armée mexicaines.
En octobre 2022, Timcast News a rapporté que quatre têtes décapitées ont été laissées dans une glacière à quelques mètres de la frontière et à seulement cinq kilomètres du poste frontière du Port de Roma, une ville américaine située dans l’État du Texas, à la frontière entre les États-Unis et le Mexique.
La scène macabre était accompagnée d’un panneau en carton avertissant le ministère mexicain de la Défense nationale de ne pas se mêler des guerres entre gangs rivaux et de les laisser gérer leurs propres affaires.
