Plus de 4,6 millions d’Ukrainiens ont quitté leur pays depuis le début de l’invasion russe, pour se réfugier dans les pays voisins. La Pologne accueille à elle seule plus de la moitié des réfugiés.
Parmi les 32 pays qui ont ouvert leurs portes aux réfugiés, la Roumanie, la Hongrie, la Russie, la Moldavie et La Turquie ont accueilli quelque 2 millions de réfugiés à ce jour. La Pologne, pays voisin de l’Ukraine, a accueilli à elle seule 2,6 millions de réfugiés, dont la plupart sont des femmes et des enfants.
La Pologne, qui compte 38 millions d’habitants, commence à ployer sous l’immense pression que représente l’accueil de tant de personnes en si peu de temps.
À Cracovie, la deuxième plus grande ville de Pologne, le nombre de réfugiés s’élève à 150 000, ce qui a augmenté la population de la ville de 20 % en l’espace de quelques semaines et a incité l’agence des Nations unies pour les réfugiés à y ouvrir un bureau.
À Varsovie, le nombre de réfugiés dépasse 10 % de la population de la ville, qui compte 1,8 million d’habitants.
Afin de répondre aux besoins des Ukrainiens en fuite, le gouvernement polonais a promulgué le mois dernier, une loi autorisant les Ukrainiens à vivre et à travailler légalement dans le pays pour une durée minimum de 18 mois. Le gouvernement apporte une aide financière aux municipalités, qui s’efforcent de trouver des logements à long terme, des emplois et des places dans les écoles pour les personnes déplacées.
Christine Goyer, la représentante de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) en Pologne, a déclaré : « Les gens, les communautés locales, les municipalités et le gouvernement polonais ont fait des efforts considérables pour recevoir et accueillir les nouveaux arrivants. Ce qui est important maintenant, c’est que la communauté internationale se mobilise pour aider à fournir un soutien plus durable, tandis que l’accès à la protection et à l’asile est assuré et maintenu pour toutes les personnes qui cherchent la sécurité aux frontières de la Pologne. »
De nombreux Polonais se sont portés volontaire pour accueillir des familles ukrainiennes, recueillant des dons et apportant leur aide. Des espaces commerciaux et industriels ont été rapidement réaffectés en centres d’aide humanitaire, hébergeant des milliers de réfugiés en fuite. Cependant, face à l’ampleur de ce mouvement migratoire sans précédent, l’inquiétude grandit en Pologne.
S’exprimant aux côtés du président Joe Biden le mois dernier, le président polonais Andrzej Duda a déclaré que si l’invasion russe se poursuivait, le nombre de réfugiés continuerait à augmenter, ce qui représenterait un « énorme défi » pour le pays.
Une destination privilégiée
La Pologne est une destination idéale pour les Ukrainiens en fuite, en raison de sa frontière commune, mais aussi des liens culturels étendus entre les deux pays.
La migration de main-d’œuvre entre les deux pays est ancienne et les similitudes entre les langues, toutes deux slaves, facilitent la communication.
Brain Porter-Szucs, professeur d’histoire à l’université du Michigan, explique que « les Ukrainiens peuvent se fondre dans la masse beaucoup plus facilement que les précédents groupes qui ont sollicités l’aide de la Pologne. Si vous regardez un Ukrainien et un Polonais, vous ne serez pas en mesure de dire qui est qui, et cela contribue indéniablement à la volonté d’aider des Polonais. »
Après avoir répondu aux besoins immédiats des réfugiés, la Pologne doit maintenant faire face aux conséquences à moyen et long terme de l’accueil d’un si grand nombre de personnes.
Les autorités polonaises ont ouvert le système éducatif du pays aux réfugiés, ce qui suscite un débat important sur la manière de gérer ce processus. Comme beaucoup de réfugiés sont des enfants, leur intégration dans le système scolaire polonais représente un défi majeur.
Bien que les langues des deux pays soient similaires, il existe une différence notable susceptible de rendre l’enseignement en classe très difficile pour les enfants ukrainiens. En Pologne, il existe très peu d’infrastructures pour enseigner le polonais comme deuxième langue et les enseignants manquent de formation et de ressources pour gérer la situation, ce qui en a incité certains à suggérer la création d’écoles ou de classes séparées pour les enfants de réfugiés ukrainiens.
Certains parents polonais s’inquiètent du fait que les enfants ukrainiens bénéficieront de ressources qui auraient pu profiter à leurs propres enfants.
Déséquilibre entre les sexes et pénurie de main-d’œuvre
La perte d’hommes ukrainiens dans les industries clés de la Pologne ne fait qu’aggraver le problème. Avant l’invasion russe, de nombreux ukrainiens établis en Pologne se rendaient en Ukraine pour travailler. Beaucoup sont retournés chez eux pour aller au front tandis que les femmes ont fui.
Un grand nombre de ces migrants saisonniers travaillaient sur des chantiers de construction et dans des fermes à travers la Pologne, jouant un rôle clé pour l’économie nationale.
Brain Porter-Szucs, professeur à l’université du Michigan, a écrit : « Il y a maintenant une certaine inquiétude parce que presque tous les hommes ukrainiens sont rentrés chez eux pour se battre. Tout à coup, de nombreux projets de construction doivent être stoppés en raison du manque de personnel. »
Du fait de la diminution du nombre de personnes en âge de travailler et de l’augmentation de la population âgée en Pologne, le pays a désespérément besoin de plus de travailleurs à moyen et long terme.
Toutefois, selon l’issue de la guerre, de nombreux hommes ukrainiens pourraient émigrer en Pologne pour rejoindre définitivement leurs familles, ce qui stimulerait la population et l’économie polonaises dans les années à venir.
Rédacteur Fetty Adler
Collaboration Jo Ann
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