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Monde. Le géant chinois de l’immobilier, Evergrande, au bord de la faillite

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Le géant chinois de l’immobilier, Evergrande, se retouve au bord de la faillite, incapable d’honorer ses dettes. Les actions de la société, cotée à Hong Kong depuis 2009, se sont effondrées cette année, les investisseurs s’inquiétant de la santé financière de l’entreprise. Après avoir atteint un pic de 17,26 HKD (dollar de Hong Kong) le 19 janvier, les actions de la société se négocient désormais à environ 3,62 HKD.

Présent dans plus de 280 villes, Evergrande est le plus gros promoteur immobilier du pays. Cette entreprise essentiellement immobilière, s’est aventurée dans d’autres secteurs ces dernières années, comme ceux des marchés alimentaires, de l’eau minérale, des parcs d’attractions, des assurances,de la santé, du numérique et du tourisme. Cependant, les niveaux d’endettement ont atteint une ampleur catastrophique. Le groupe a récemment déclaré que son passif total s’élevait à environ 1.970 milliards de yuans (305 milliards de dollars), ce qui est à peu près égal à la dette publique du Portugal, et a également mis en garde contre les « risques de défauts et d’emprunts. »

Lundi, des investisseurs en colère ont manifesté devant le siège du groupe à Shenzhen (sud), certains créanciers exigeant le remboursement immédiat des prêts. Selon l’agence d’information financière REDD, Evergrande prévoit de suspendre le paiement des intérêts sur des prêts accordés à deux banques, qui sont dus au 21 septembre. L’entreprise doit rembourser 15 milliards de dollars à ses créanciers d’ici la fin de l’année. Or, à la fin du mois de juin, l’entreprise ne disposait que de 13 milliards de dollars sur ses comptes. Les banques sont devenues réticentes à financer davantage l’entreprise.

En août, l’agence de notation Moody’s a abaissé la note de solidité d’Evergrande, s’inquiétant de la capacité de l’entreprise à rembourser ses dettes. La note indiquait que l’entreprise était « probablement en défaut de paiement, ou très proche de l’être ». Goldman Sachs a également abaissé la note de l’action de « neutre » à « vendre ».

Au cours de ces dernières semaines, l’agence de notation financière internationale Fitch Ratings a également abaissé ses notes pour l’entreprise, signifiant qu’un défaut de paiement est « problable ». « Nous pensons que le risque de crédit est élevé compte tenu des liquidités limitées, de la baisse des ventes sous contrat, de la pression exercée par les fournisseurs et les entrepreneurs pour régler les retards de paiement, et des progrès limités en matière de cession d’actifs », a déclaré l’agence.

La société de notation de crédit China Chengxin International Credit Rating Co (CCXI) a récemment abaissé la note des obligations onshore d’Evergrande de AAA à AA. Le 6 septembre, les obligations émises par la société ont chuté de plus de 25 %, obligeant la Bourse de Shanghai à suspendre temporairement les échanges.

Selon un rapport de Bloomberg du 9 septembre, le Comité de la stabilité et du développement financiers, principal régulateur financier du pays, a approuvé la proposition d’Evergrande de renégocier ses délais de paiement avec les prêteurs. La société aurait contacté les trusts et les banques pour demander des prolongations de délai.

« Cette évolution suggère qu’Evergrande a obtenu le soutien des autorités pour négocier avec ses créanciers au coup par coup, alors qu’elle tente d’atténuer la pénurie de liquidités qui a inquiété les investisseurs sur le marché obligataire chinois de 12 000 milliards de dollars. Alors que les principales banques de la société avaient discuté de la création d’un comité de créanciers pas plus tard que la semaine dernière afin de consolider les décisions de remboursement, les prêteurs et les régulateurs ont décidé de donner à Evergrande plus de temps pour résoudre sa crise de liquidités avant de prendre des mesures plus radicales », indique l’article.

Pékin a qualifié Evergrande de « rhinocéros gris », un terme utilisé pour définir un danger évident et pourtant longtemps ignoré, pour cette grande entreprise dont le niveau d’endettement est tel qu’elle présente un risque financier systémique. L’entreprise emploie environ 200 000 personnes, tout en soutenant plus de trois millions d’emplois indirects. Les banques étant réticentes à fournir les fonds nécessaires, Evergrande a du mal à mener à bien ses projets immobiliers, ce qui la prive à son tour de rentrées de fonds.

Au cours des six premiers mois de cette année, le revenu net de la société a chuté de 29 % par rapport à l’année dernière. L’entreprise doit donc maintenant tenter de réduire son niveau d’endettement tout en s’assurant qu’elle reste rentable.

« Dans une économie de marché normale, Evergrande aurait fait faillite depuis longtemps… La règle était que, tant qu’une entreprise semblait aller de l’avant - avec de nombreux projets dans le pipeline - les banques lui accordaient des crédits, étant entendu que la force de la croissance économique chinoise générerait toujours des bénéfices », a déclaré à France24 Jean-François Dufour, directeur du cabinet de conseil français DCA Chine-Analyse, spécialisé de la Chine.

Au cours de l’année écoulée, Pékin a poussé les entreprises lourdement endettées à se désendetter. Toutefois, le régime chinois est confronté à un défi avec Evergrande, car si l’entreprise s’effondre, il pourrait y avoir de « profondes conséquences » pour l’ensemble de l’économie.

Jean François Dufour pense que si Evergrande faisait faillite, une banque au moins « coulerait ». D’autres banques hésiteraient alors à accorder des prêts à des entreprises très endettées, ce qui aurait de graves conséquences pour la croissance économique de la Chine. L’effondrement d’Evergrande aurait des répercussions sur le marché international, car les investisseurs incluent des gestionnaires d’actifs mondiaux comme BlackRock, Allianz et Ashmore.

Compte tenu de la gravité des conséquences potentielles, les experts pensent que Pékin imposera un programme de restructuration de la dette à l’entreprise et fera en sorte que les créanciers acceptent ses plans. Evergrande pourrait également passer sous le contrôle de l’État.

Larry Ong, analyste chinois du cabinet de conseil politique SinoInsider, a déclaré à l’AFP que le « meilleur scénario » pour Evergrande est que le gouvernement chinois trouve un moyen d’empêcher la faillite de l’entreprise et « donne aux créanciers de l’entreprise l’espoir qu’ils sortiront de la débâcle avec au moins quelque chose, et évite le déclenchement de plus grands troubles sociaux ».

Selon Larry Ong, un renflouement irait à l’encontre des intérêts de Pékin, « car il ne ferait que signaler aux autres sociétés immobilières et institutions financières criblées de dettes qu’elles peuvent s’en tirer avec le genre de pratiques que le gouvernement tente d’éradiquer ».

Rédacteur Fetty Adler

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