Selon la légende, les caractères chinois furent inventés par un homme nommé Cangjie, fonctionnaire à l’époque du légendaire Empereur Jaune, Huangdi (黄帝).
Huangdi confia à Cangjie, un homme d’une intelligence remarquable, une tâche ardue: déterminer la quantité exacte de bétail et de céréales en leur possession. En peu de temps, Cangjie fut capable de mémoriser tout ce dont il avait la garde, mais le stock augmenta. Incapable de se souvenir de tout, Cangjie se trouvait dans une situation délicate.
Cangjie s'est inspiré des empreintes d'animaux
A l’époque, il n’y avait pas d’écriture, il ne pouvait donc pas tout écrire. Après mûre réflexion, lui vint une idée : il utilisa des coquillages et des nœuds sur des cordes de couleurs différentes pour représenter les quantités de différents aliments. Cette technique était employée depuis plusieurs années. Cependant, il se rendit compte que cette méthode ne pouvait être utilisée à long terme et qu’elle serait bientôt inefficace. « Comment procéder pour ne pas me tromper ? » songea-t-il.
Alors, le destin s’en mêla. Cangjie partit à la chasse avec des compagnons. Lorsque le groupe parvint à une intersection, trois personnes discutèrent sur le chemin à emprunter. Cangjie découvrit que leur décision se fondait sur les différentes empreintes de sabot visibles au sol. Il s’en inspira : ne pouvait-il pas inventer des caractères pour représenter tout ce qui existe sur terre ? Ainsi, il pourrait les utiliser pour tenir ses registres.
Cangjie se mit à l’ouvrage. Il prêta une attention particulière aux éléments à représenter, et constitua rapidement une longue liste de caractères, qu’il organisa avec minutie. Cangjie présenta son travail à Huangdi. Celui-ci, très impressionné, réunit les premiers ministres des neuf provinces afin que Cangjie leur enseigne ce nouveau système d’écriture. Huangdi félicita son fonctionnaire et lui offrit le poste d’historien.
Cangjie se mit à l’ouvrage et créa des symboles pour représenter des éléments existants (Image : Wikimedia Commons / CC BY 1.0)
Tout le monde complimenta Cangjie. Il acquit une excellente réputation. Au fil des jours, Cangjie commença à devenir vaniteux et à afficher une forme de mépris pour son entourage. En l’apprenant, une vive colère s’empara de Huangdi. L’Empereur Jaune souhaitait que son employé ouvre les yeux: Cangjie devait réaliser à quel point il avait changé. Il fallait qu’il retrouve son humilité d’antan. Huangdi convoqua un vieil homme et lui exposa les faits. Le vieil homme réfléchit et décida de rencontrer Cangjie.
Le vieil homme se rendit à un cours d’écriture de Cangjie. Il s’assit au dernier rang et écouta attentivement. Après le cours, tout le monde partit, sauf lui. Cangjie s’en étonna, et lui demanda : « Pourquoi restez-vous ici ? »
« Cangjie, les symboles que vous avez créés sont bien connus de tous, mais je suis un vieil homme, et je ne vois plus clair. Quelques symboles me posent problème. Pouvez-vous m’aider ? »
Cangjie prêtait une oreille attentive
« Les symboles que vous avez créés pour le cheval et le mulet ont été créés pour donner l’impression qu’ils ont quatre pattes, alors ils sont clairs. Une vache aussi a quatre pattes, et pourtant, le symbole ne comporte ni patte, ni queue. Le symbole du poisson a quant à lui quatre pattes, et pas de queue non plus. Je trouve cela déroutant. »
Une vague de panique envahit Cangjie: comment avait-il pu être aussi négligeant ? Il s’était trompé, avait inversé les deux symboles en les enseignant. Cangjie, très gêné, comprit que son arrogance était à l’origine de son erreur. L’erreur était d’autant plus grave qu’elle avait de lourdes conséquences: les symboles étaient répandus, on ne pouvait plus les changer. Alors, il s’agenouilla devant le vieil homme, plein de regrets. Le vieil homme lui tendit la main, et déclara : « Cangjie, les symboles que vous avez créés seront transmis de génération en génération. Votre œuvre est remarquable, mais votre arrogance est de trop. Après tout, vous n’êtes qu’un homme. »
Après l’incident, Cangjie examina scrupuleusement chaque nouveau symbole, demanda l’avis des autres, et corrigea son attitude désobligeante. Les caractères ne furent enseignés à tous qu’une fois établi un accord commun.
Rédacteur Lia Suzuran
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