Comme promis voici la suite de l’histoire de Huizong. (Partie I)
Envoyer le mauvais message
Une fois la paix retrouvée entre la Dynastie Song et le royaume de Jin, le grand Empereur Huizong et son fils aîné, l’Empereur Qinzong, passaient leurs journées en de fastueuses réceptions au palais impérial. Mais cela ne dura qu’un temps.
En mai 1126, les Jin envoyèrent deux ambassadeurs au palais impérial. Lorsque l’Empereur Qinzong découvrit que les ambassadeurs étaient membres de la noblesse de l’ancienne dynastie Liao, il leur proposa de regrouper leurs forces pour faire alliance contre les Jin. Mais, au lieu de cela, les ambassadeurs révélèrent le message aux Jin, ce qui les rendit furieux et ils déclarèrent la guerre.
Rapides comme l’éclair
Les soldats Jin, qui venaient à peine de rentrer chez eux après leur dernière bataille contre les Song, furent vite mobilisés. Ayant tiré les leçons de leurs erreurs passées, ils renforcèrent leurs troupes et foncèrent droit sur la capitale, comptant sur leur rapidité et leur grand nombre.
En revanche, les Song avaient déjà renvoyé leurs soldats et leurs généraux loin de la capitale. Manquant de généraux expérimentés, la défense des Song était désastreuse. Ils demandèrent de l’aide et reçurent des réponses de tout le pays, y compris de la part du plus jeune fils de Huizong qui leva des troupes pour venir au secours de son père et de son frère.
Mais les forces Jin, plus rapides, assiégèrent la capitale. Le 9 janvier 1127, la capitale des Song, Hangzhou, tomba. Les Jin capturèrent le Grand Empereur Huizong, son fils Qinzong, ainsi que toute la cour - ministres, gardiens, domestiques, en tout 14 000 personnes - qu’ils expédièrent à marche forcée en Mandchourie. Beaucoup moururent en route.
La complainte d’un général
Xuejun Wang dans la production de La loyauté
de Yue Fei par la compagnie Shen Yun - 2007.
(Photo : Shenyunperformingarts.org)
Rarement la Chine avait-elle dû faire face à la capture et la déportation d’empereurs. Cet incident sera connu dans l’histoire comme Jing Kang chi, c’est à dire « L’humiliation de l’année de Jing Kang ». (Les empereurs chinois donnaient un nom spécifique à chaque année de leur règne. L’ironie est que Jing Kang signifie « tranquille, bien être paisible ».)
Cette phrase sera immortalisée dans le célèbre poème du Général Yue Fei : La rivière devient rouge.
« Jing Kang Chi, you wei xue
chen zi hen, he shi mie »
« L’humiliation de Jing Kang perdure, la revanche attend encore son heure,
Les sujets loyaux se lamentent, quand cela s’éteindra-t-il ? »
Le Grand Empereur et son fils en exil, les Song étaient gouvernés par l’Empereur Gaozong, le plus jeune des fils de Huizong, et constamment engagés dans des escarmouches sur la frontière avec les Jin. Dans ces combats, le Général Yue Fei était le chef le plus prestigieux.
Malheureusement, les choses n’allaient pas bien que ce soit pour le général ou pour les empereurs captifs. Après que Yue Fei ait combattu les Jin pendant dix ans, un officiel corrompu et vindicatif appelé Qin Hui convainquit l’Empereur Gaozong qu’il valait mieux ne plus penser à sauver son père et son frère aîné des Jin. S’ils revenaient, lui, Gaozong serait bien obligé de rendre le trône, n’est-ce pas ?
La fin d’une époque
En vérité, Qin Hui haïssait Yue Fei, général remarquable, poète et personnage d’une grande probité. Les gens aimaient leur général et le traitaient comme un héros. Qin Hui, fou de jalousie, poussa par ruse l’empereur à ordonner le retour de Yue Fei dans la capitale pour être jugé pour haute trahison.
La ruse était tellement grotesque que Yue Fei et ses hommes la détectèrent immédiatement. Ses soldats le supplièrent de rester, lui promettant même de le soutenir comme nouvel empereur, mais le loyal Yue Fei choisit d’obéir à l’ordre impérial.
Dans la capitale, Qin Hui traduisit Yue Fei devant un tribunal à huit clos mais ne put apporter la moindre preuve de trahison. Il ordonna tout simplement de l’exécuter immédiatement.
Avec la disparition de l’irremplaçable Yue Fei, les Jin gardèrent la haute main sur les terres au-delà des frontières nord des Song. C’est ainsi que les Song, amputés, devinrent connus sous le nom de Dynastie des Song du sud.
Entre temps, dans la capitale des Jin, les empereurs Song exilés vivaient comme des prisonniers. Huizong n’eut jamais plus lvoccasion de poser un pinceau sur du papier et succomba au froid et à la faim, mourant en exil avec son fils.
Un portrait par la calligraphie
Aussi pourquoi admirons-nous l’Empereur Huizong de nos jours ? Comme empereur, il échoua lamentablement en négligeant les affaires de l’Etat, se laissant aller à des amusements frivoles et fuyant devant l’ennemi. Mais il laissa un héritage d’érudit et d’artiste à travers un style remarquable de calligraphie.
Esthétiquement parlant, le « Style fin doré » de Huizong ne m’attire pas. Il est trop fin, trop fragile, grêle au point d’être au bord de la cassure, comme si le moindre petit souffle d’air allait le disperser aux quatre vents. Il n’a ni l’aspect grandiose et majestueux de la calligraphie de la dynastie Tang, ni l’équilibre élégant des caractères de la dynastie Qing.
Mais il a encore le pouvoir de fasciner. Mieux qu’aucune peinture, plus clair qu’aucun portrait, il est le portrait accompli d’un érudit qui ne pouvait, ne voulait, et n’aurait jamais dû être empereur.
Auteur : blog de Jade Zhan, danseuse de la Compagnie Shen Yun Performing Arts
Source : https://fr.shenyunperformingarts.org/
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