Les épingles à cheveux à décor de dragon, les vases à anses en forme de phénix… les secrets de la cour impériale des Ming (1368-1644), marqués par le luxe et la délicatesse, sont ainsi dévoilés aux contemporains. Découvrons l’exposition L’Or des Ming actuellement ouverte au public, au musée Guimet à Paris.
La dynastie ming, l’un des âges d’or dans la Chine ancienne
La dynastie des Ming a été fondée par Zhu Yuanzhang en 1368 et renversée par la dynastie Qing en 1644, en passant par 16 empereurs et 276 ans d’existence. Puissance politique d’ethnie Han, contemporaine de la Renaissance, la dynastie « Ming » a renversé le pouvoir mongol des Yuan pour restaurer les traditions chinoises d’ethnie Han, dont le confucianisme. Comme son nom l’indique, Ming signifiant « brillant », cette dynastie a laissé un héritage d’une splendeur rayonnante dans les domaines de la spiritualité, de la culture et de la technologie.
La plus grande encyclopédie de l’histoire chinoise, l’Encyclopédie de Yongle, la célèbre pharmacopée Bencao gangmu ou La matière médicale classifiée ont tous été rédigés à cette époque. Trois des quatre grands romans classiques de la Chine qui sont Les Trois Royaumes, La Pérégrination vers l’Ouest et Au bord de l’eau ont aussi vu le jour sous cette dynastie.
Les objets en porcelaine Ming bleue ou le cloisonné, une technique d’orfèvrerie appliquée aux bijoux en métal supportant des pierres semi-précieuses (grenat), du verre ou de l’émail, ont aussi atteint un niveau technique incomparable.
Le développement économique de la dynastie Ming complétait sa puissance impériale, et la société se caractérisait par une forte atmosphère commerciale. La vie des masses était extrêmement aisée. La monnaie courante de la dynastie Ming était principalement l’argent, et les transactions plus importantes étaient réglées en pièces ou taels d’argent. L’or était utilisé pour fabriquer les objets de luxe. Dans un tel contexte, les produits tels que la soie, les broderies, l’or et les bijoux sont devenus des symboles de statut social, d’où le développement de techniques de fabrication de bijoux en or, basées sur les traditions chinoises Han.
Les bijoux en or des Ming restaurent la tradition chinoise Han
Depuis le temps de l’Empereur Jaune, au début des 5 000 ans de culture chinoise, le port des vêtements était réglementé en détail selon la position de l’individu dans la hiérarchie. Tout comme les vêtements, les ornements et les bijoux en or, en jade ou en argent étaient également des signes de rang et de statut social et étaient également portés selon des règles précises.
L’une des premières mesures prises par les empereurs Ming à leur arrivée au pouvoir a été de faire revivre les coutumes des dynasties Tang (618-907) et Song (960-1279), qui étaient considérées comme exemplaires de la tradition chinoise, comme en témoigne la collection d’objets en or des Ming exposés. La dynastie Ming a connu ainsi un essor sans précédent dans la production et la distribution des bijoux en or.
Épingles à cheveux ou ornements en or sous forme de dragon ou de phénix, boucles d’oreilles, plaques et passants de ceinture, pendants d’écharpe, bagues et bracelets en or, en argent ou en jade (parfois incrustés de pierres précieuses) étaient autant d’ornements indispensables à la tenue vestimentaire de la haute société.
Certains motifs reflètent la tradition spirituelle sous la dynastie Ming
Sous la dynastie Ming, le grand moine taoïste Zhang Sanfeng a parcouru la société, laissant derrière lui de nombreux miracles qui ont ravivé la foi des populations dans le divin et la spiritualité.
Par conséquent, tout au long de la dynastie Ming, à commencer par Zhu Di, le troisième empereur Ming, de l’Empereur au peuple, on vénérait généralement le taoïsme. Zhu Di a également construit à Pékin un certain nombre d’édifices dédiés à des divinités taoïstes, tels que le Temple du Ciel et le Temple des Généraux Célestes. La célèbre montagne de Wudang en Chine est le lieu où Zhang Sanfeng a conduit ses disciples à la pratique du taoïsme.
Sous l’influence d’un tel climat social, les bijoux en or des Ming ont également incarné de nombreuses figures taoïstes ou bouddhistes. Dans les objets en or exposés au musée Guimet, certains motifs ont été empruntés à des symboles spirituels.
Les motifs taoïstes, tels que les huit immortels, étaient également très populaires dans les décorations féminines. La légende veut que les huit immortels représentent les huit aspects de la vie du peuple chinois : hommes, femmes, vieux, jeunes, riches, nobles, pauvres et humbles. Les instruments divins utilisés par les huit immortels sont dotés de certaines significations, alors que le panier de fleurs de Lan Caihe permet de communiquer avec les dieux et les déesses.
La beauté féminine sublimée par les bijoux en or des Ming
La beauté des femmes sous la dynastie Ming est sublimée par des coiffures et des bijoux de plus en plus sophistiqués, reflets du faste et de l’esthétique foisonnante de la cour impériale.
Dans une société confucéenne, les femmes mariées et les hommes adultes ne se coupaient pas les cheveux. Ils les attachaient vers l’arrière pour former un chignon. Les coiffures des femmes de l’élite étaient ornées de peignes et d’épingles de formes diverses, dont le nombre et le motif représentaient le rang de la personne qui les portait.
À la fin du XVIe siècle, Juan González de Mendoza ( 1545-1618), missionnaire et sinologue espagnol, écrivait dans son livre Histoire du grand royaume de la Chine à propos de la tenue féminine des Ming : « Leurs femmes sont habillées d’une manière très particulière, semblable au style des Espagnols, elles portent beaucoup de bijoux en or et de pierres précieuses, leurs robes ont de larges manches, et elles portent de l’or, de l’argent et toutes sortes d’étoffes de soie…elles ont une grande quantité de soie d’une excellente qualité…Elles ont une belle chevelure, qu’elles peignent avec soin et diligence, comme les Génoises, et qu’elles attachent sur leur tête avec de larges rubans, ornés de perles et de pierres précieuses ».
Les boucles d’oreilles comptent parmi les parures féminines les plus répandues. On distingue trois modèles, tous destinés aux oreilles percées. Les boutons d’oreilles présentent un petit ornement placé devant le lobe, avec une épaisse tige en « S » à l’arrière, qui fait office de contrepoids, qui s’appuie derrière l’oreille sur l’os mastoïde ou dans le cou.
Les épingles à cheveux sous forme de phénix ou de dragon apparaissent souvent parmi les accessoires de l’impératice, comme le témoigne ce tableau de la première impératrice de la dynastie Ming.
Les épingles à cheveux décorées de lanternes, quant à elles, rappellent les activités de loisir organisées par les empereurs Ming à l’occasion du Nouvel An chinois et de la Fête des lanternes. Leslanternes de palais ont une histoire de plus de 2 000 ans en Chine, qui a débuté sous la dynastie des Han de l’Est et s’est épanouie sous les dynasties des Sui et des Tang.
La vaisselle en or de l’empereur
Juan González de Mendoza, dans son livre, décrit également la vie en Chine sous la dynastie Ming : « Des banquets et des fêtes étaient organisés chez ces Chinois, plus que chez n’importe quel autre peuple au monde ». Cette coupe décorée de dragons ou ces aiguières à décor de dragon et de lion confirment la richesse des Chinois de l’époque, ainsi que la virtuosité de l’orfèvre.
La collection exposée vient du musée d’art Qujiang à Xi’an
Bien que la grande majorité des objets en or de Ming ait disparu, certains ont pu être préservés jusqu’à nos jours. Les œuvres présentées dans cette exposition proviennent de la collection Dong Bo Zhai du musée d’art Qujiang, à Xi’an.
Il s’agit d’un musée privé d’art chinois et ancien, fondé par M. Peter V. Kwok, situé à Xi’an, l’une des plus grandes capitales anciennes de Chine. Le musée a ouvert ses portes en 2012 et se concentre sur la recherche curatoriale et les échanges scientifiques. La collection Dong Bo Zhai du musée comprend des objets en or provenant du palais impérial de la dynastie Ming et des poteries colorées de la dynastie Han.
Info pratique :
18 septembre 2024 - 13 janvier 2025, Musée Guimet, Tarif plein : 13€, Tarif réduit : 10€
Reportage Jade Lee
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