La cuisine chinoise a une longue histoire. Afin de préparer des plats délicieux, les chefs doivent posséder d’excellentes compétences et des bases solides. En général, ce sont les femmes qui sont chargées de préparer les trois repas à la maison, mais les chefs dans les restaurants et les hôtels sont principalement des hommes. Ce qui est vrai tout au long de l’histoire de la Chine, bien qu’il y ait eu des exceptions, par exemple celle des femmes chefs dans la Chine ancienne sous la dynastie des Song.
La plupart des chefs célèbres de la Chine ancienne étaient des hommes. Par exemple, Peng Keng à l’époque de l’empereur Yao (2356 à 2255 av. J.-C.), Yi Yin à l’époque de l’empereur Shang Tang (1649 à 1549 av. J.-C.), Yi Ya au cours de la période du Printemps et de l’Automne (770 à 476 av. J.-C.) et Zhuan Zhu à la fin de la période du Printemps et de l’Automne du royaume de Wu (584 av. J.-C.) étaient tous des hommes.
Le parangon de la cuisine
Yi Yin était considéré comme l’ancêtre de la cuisine chinoise. Il était à l’origine l’esclave de la femme de l’empereur avant de devenir le chef de l’empereur lui-même. Yi Yin ne voulait pas être un esclave à vie, alors en préparant les repas de Shang Tang, il saisissait l’occasion de partager son analyse des affaires courantes. Shang Tang était si impressionné qu’il a fini par faire de Yi Yin le premier ministre. Yi Yin a ensuite aidé Shang Tang à conquérir la dynastie Xia, il est devenu un premier ministre illustre. Il a également transmis son art culinaire et a été appelé le parangon de la cuisine.
Les chefs masculins dominent
La dynastie Zhou (1046 à 256 av. J.-C.) a établi sa capitale à Luoyang. La famille impériale employait environ 2 000 personnes en cuisine, mais aucune femme n’était directement impliquée dans la cuisine. Bien que la culture culinaire de Luoyang se soit épanouie plus tard, sous la dynastie des Han orientaux et sous les dynasties Wei et Jin, les dessins de banquets et de cuisines découverts dans les tombes montrent surtout des chefs masculins au travail.
Bien que les archives historiques montrent que la majorité des chefs était des hommes, cela ne signifie pas qu’il n’y avait pas de femmes chefs dans la Chine ancienne. Ces femmes chefs existaient bel et bien sous la dynastie Song, et elles n’étaient pas de simples ouvrières de cuisine sans aucune qualification. Ces femmes étaient des maîtres dans les quatre arts (cithare, jeu de stratégie appelé Go, calligraphie et peinture). Elles étaient bien formées, élégantes et expérimentées et se spécialisaient dans le service des personnes riches et célèbres.
Femme chef cuisinière de la dynastie Song
Un livre de la dynastie Song, Jiang Xing Za Lu, relate l’histoire d’une femme chef qui se distingua des chefs des autres époques.
Selon l’histoire, le gouverneur d’une province quitta son poste et retourna dans sa ville natale. Il se rappela avoir été invité un jour chez un fonctionnaire de la capitale pour un repas et tous les plats servis étaient délicieux. Il découvrit que le fonctionnaire avait engagé une femme chef pour préparer le repas.
Le gouverneur à la retraite voulut également engager une femme chef et régaler ses amis et sa famille d’un délicieux repas, il écrivit donc à un ami vivant dans la capitale pour lui demander de l’aider à trouver un chef. Son ami lui répondit : « Il y a des femmes chefs ici, mais aucune ne souhaite parcourir de longues distances ».
Le vieux gouverneur était déçu, mais il reçut bientôt une deuxième lettre de son ami : « J’ai trouvé un chef pour toi. Elle a 20 ans, est jolie et instruite. Et ses compétences culinaires sont exquises ».
Il fut heureux en recevant cette nouvelle et attendit chaque jour l’arrivée de la chef. Elle arriva finalement un mois plus tard, mais elle n’alla pas chez lui sitôt arrivée. Elle choisit de rester dans une auberge à environ 1,5 km de là.
Elle écrivit une lettre pour complimenter le gouverneur et lui demander poliment d’envoyer un palanquin chaud pour venir la chercher, comme il se doit.
Le gouverneur envoya immédiatement des personnes portant un palanquin pour l’accueillir. Lorsqu’elle arriva, tout le monde l’observa et remarqua qu’elle n’avait rien d’une roturière. Elle portait une belle robe et ses manières étaient élégantes. Le vieux gouverneur fut très satisfait et attendit avec impatience le lendemain pour déguster un délicieux repas.
Ainsi, le jour suivant, le gouverneur lui dit : « Préparez un repas avec cinq plats et cinq bols de riz. » Elle écrivit une liste d’ingrédients et la donna au gouverneur. Il fut surpris par ce qu’il vit : pour un plat utilisant de la tête d’agneau, elle avait besoin de 10 têtes d’agneau et de 2 kilos d’oignons verts. Puisque c’était la première fois qu’il l’employait, il demanda à un serviteur d’acheter les produits selon la liste.
Une fois les ingrédients préparés, la chef mit un haut uni et une jupe fleurie. Elle demanda aux servantes d’ouvrir son coffre à outils culinaires contenant des couteaux de cuisine, une planche à découper, des casseroles et des poêles. Elle avait également apporté avec elle des couverts en argent fin pour la table, dont l’aspect brillant suscita beaucoup d’éloges.
Une fois tout en place, elle retroussa lentement ses manches, révélant un bracelet en argent brillant sur son poignet doux et délicat. Elle coupa les légumes et la viande de ses mains expertes et délicates, et n’utilisa qu’environ 20 % de chaque ingrédient. Par exemple, après avoir blanchi l’agneau dans l’eau bouillante, elle ne préleva que deux morceaux de viande et jeta le reste. Après que l’oignon vert fut rapidement blanchi dans de l’eau bouillante, seule la partie tendre du centre fut conservée, et le reste jeté.
Quelqu’un lui demanda pourquoi elle jetait autant, elle répondit alors : « On ne garde que le meilleur pour les personnes de haut rang ».
Un plat préparé à partir des meilleurs ingrédients remporta évidemment les éloges des invités. Le commentaire unanime « ces plats sont tellement parfumés et si savoureux ! » permit au gouverneur de faire bonne figure, même si cela lui coûta très cher.
La chef cuisinière déclara le lendemain : « Le repas d’hier était un essai et je suis heureuse que vos invités l’aient apprécié. J’aimerais être rémunérée comme il est d’usage ». Le gouverneur manifesta de l’incrédulité, elle expliqua alors : « L’une des règles de notre profession est d’être rémunéré selon les usages du passé. Nous recevons une chaîne de 10 000 pièces d’argent et 24 boulons de soie pour les grands banquets, et la moitié de cette somme pour un repas familial ».
Les femmes chefs dans la Chine ancienne
Même si le gouverneur trouva le prix élevé, il n’eut pas d’autre choix que de payer en conséquence. Il pensa : « Pour quelqu’un comme moi qui n’est pas riche et puissant, je ne devrais pas engager des chefs et organiser de grands banquets comme celui-ci ». Peu de temps après, le vieux gouverneur renvoya la chef de cuisine chez elle.
L’histoire de cette femme chef raffinée, élégante et talentueuse permet de porter un regard différent à celle de l’image stéréotypée des chefs dans la Chine ancienne. En effet, la tradition culinaire de la dynastie Song atteignit un niveau de raffinement extrêmement élevé et des femmes chefs dans la Chine ancienne aux compétences exceptionnelles ont servi, tout au long de l’histoire, les plus riches et les plus puissants de l’Empire.
Rédacteur Yasmine Dif
Source : The Rise of Female Chefs in Ancient China : From Imperial Kitchens to Serving the Elite
www.nspirement.com
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