Dans la culture traditionnelle chinoise, les cinq éléments, en chinois wǔxíng, contiennent toute chose, tout être, toute émotion et tout acte. Le yin et le yang influencent chaque élément que sont le bois, le feu, le métal, l’eau et la terre. Pour exister et vivre, chaque être a besoin de l’énergie provenant de différentes dimensions, comme l’énergie vitale appelée qi. Par conséquent, ces énergies sont indissolubles des cinq éléments.
La grande complexité de chaque élément est assez déroutante pour un occidental. À chaque élément correspond une couleur, une saveur, une odeur, certaines parties du corps humain, une émotion, un caractère, un sens, une fonction, une énergie, une saison… Les éléments se créent, se dominent, s’annihilent au gré des changements cosmiques. L’art de gérer les cinq éléments, ainsi que le yin et le yang, est un équilibre à trouver pour être en harmonie avec soi, avec les autres, avec la terre et le ciel.
Les deux principaux créateurs de la théorie des cinq éléments
Wǔxíng est composé de deux idéogrammes. Le wǔ en français, c’est le chiffre 5. Le xíng (行) traduit par élément, intègre également les notions d’action, de vertu et d’effets de l’élément. C’est la racine de la vision holistique de la science chinoise.
Zōu Yǎn (-305 à -240 av. J.-C.) est un philosophe qui aurait unifié en un système cohérent la théorie du yin-yang et des cinq éléments. C’est lui qui aurait structuré la dynamique de chaque élément et les relations entre eux.
Dǒng Zhòng Shū (-194 à -115 av. J.-C.) a compilé ces connaissances dans un livre Rosée luxuriante des Annales du printemps et de l’automne qui traite de sujets tels que les cinq éléments et leur relation avec la politique.
火 huǒ, l’élément feu
Huǒ représente l’été, soit le deuxième trimestre du calendrier lunaire. Sa couleur est le rouge, son climat est la chaleur et son point cardinal est le sud. Tous ces éléments font penser que l’élément feu représente la période de la vie qui croît vers son apogée, pleine de vitalité, de passion et de force mais qui, en excès, amène à la destruction prématurée.
Le nán fāng zhū què ou oiseau vermillon du sud est une créature spirituelle mythologique des constellations chinoises. Il commande le feu, l’été et le sud. Certaines légendes disent que son corps est en correspondance avec les corps célestes. Sa tête représentant le ciel, ses yeux le soleil, son dos la lune, ses pieds la terre et sa queue les planètes. Ainsi, l’oiseau était considéré comme un lien entre notre monde ici-bas et l’au-delà.
La planète liée à l’élément feu est mars parce qu’elle brille comme du feu. De plus, au solstice d’été, Mars est vu au sud, au moment où le climat estival arrive et le sol est chaud. Mars représente les désirs les plus forts d’une personne, les émotions irréfléchies, mais aussi la motivation pour toute chose.
La relation que le feu entretient avec les autres éléments est la suivante : Le feu est nourri par le bois. Ainsi il nourrit la terre, en réduisant ce qu’il brûle en cendre. Il domine le métal car il le fait fondre, mais il est dominé par l’eau qui l’éteint
L’élément feu, la musique et le temps
La note 徵, zhǐ est l’une des cinq notes de la musique chinoise. Elle est liée à l’élément feu. La musique zhǐ est principalement émotionnelle, comme le feu. Elle touche le cœur, l’écouter rend généreux. Les instruments qui l’expriment le mieux sont les instruments à cordes, notamment l’erhu. Cet instrument transmet parfaitement la joie ou la tristesse qui agit sur le cœur et le système circulatoire. L’harmonie étant au milieu, la joie s’équilibre avec la tristesse.
Le calendrier sexagésimal était utilisé dans la Chine antique ainsi qu’au Japon, Vietnam et Corée. Son origine est ancienne, des documents attestant son existence remontent à plus de trois mille ans. Il est composé de dix tiges célestes et douze branches terrestres. Le système des dix tiges célestes proviendrait d’une légende parlant de dix soleils, qui se levaient à tour de rôle, jusqu’au jour où l’immortel Hou Yi reçut un arc magique et détruisit neuf soleils.
La troisième et la quatrième tige céleste sont toutes deux associées à l’élément feu, la première étant yang et la deuxième étant yin. Chacune des branches terrestres est liée à un des douze animaux de l’astrologie chinoise. La branche 6, yin et correspondant au serpent, et la branche 7, yang et correspondant au cheval, sont également liées à l’élément feu.
Le livre Classique interne de l’empereur Jaune explique que le chaud engendre le feu, le feu engendre l’amer, l’amer engendre le cœur, le cœur engendre le sang, le sang engendre la rate.
L’élément feu en lien avec l’être humain
Les dynasties se suivent selon un cycle immuable. Quand l’une est en déclin, une autre prend le pouvoir. Jusqu’à la dernière dynastie, chaque dynastie se targuait de l’élément qui dominait la précédente afin de justifier que sa prise de pouvoir était bien en accord avec les arrangements des cieux. Le roi Wen, (aux alentours de 1100 av. J.-C.) est le fondateur de la dynastie Zhou qui régna durant 900 ans. Il était emprunt d’une grande sagesse, son conseiller et ministre était Jiang Ziya, il avait un grand savoir-faire stratégique, politique et économique. Zhou, liée au feu, succéda à la dynastie Shang qui était liée au métal.
Selon le livre Lingshu « l’homme est en union avec la voie céleste, à l’intérieur du corps, il y a cinq viscères en correspondance avec les cinq sons, les cinq couleurs, les cinq époques, les cinq saveurs, les cinq positions ».
Chaque partie du corps est en lien avec un élément. Le côté ambitieux de la jeunesse se retrouve dans les canines, elles sont donc en lien avec l’élément feu. Il en est de même pour le majeur de notre main.
Les cinq éléments font partie des piliers du confucianisme, et la bienséance est une vertu confucéenne liée à l’élément feu. Le livre Classique des rites est aussi rattaché à cet élément.
L’élément feu apporte la joie et celle-ci s’équilibre avec la vertu confucéenne de bienséance qui veut que l’on ne manifeste pas excessivement ses sentiments. En effet, la joie est un sentiment agréable comme un feu de cheminée, mais parfois il arrive qu’elle se transforme en excitation et épuise la personne qui la vit, ainsi que ses proches. Apprendre à se contenir évite donc de subir le contre coup.
Comme toute chose à son opposé, un excès de joie non maîtrisé, une fois passé, aboutit à un grand vide qui permet à la tristesse ou la peur de s’inviter. De même, une vie sans joie éteint le cœur. Il arrive souvent qu’une personne ayant perdu des êtres chers et n’ayant plus de raison de vivre meurt, le cœur n’ayant plus la force de battre.
L’organe lié au feu est le cœur, ainsi que le système sanguin et les intestins. Le syndrome de tako-tsubo ou syndrome du cœur brisé est provoqué par une décharge intense et brutale d’hormones au cours d’un stress intense, généralement provoqué par une mauvaise nouvelle. Les cellules du cœur se paralysent, ce qui peut conduire à un accident cardiovasculaire grave. Ce sont majoritairement les femmes de plus de 65 ans qui sont touchées.
Le Dr Christian Templin et son équipe de l’hôpital universitaire de Zurich (Suisse), ont mené une recherche sur les causes de cette cardiomyopathie de stress. Si une mauvaise nouvelle en est généralement à l’origine, ils se sont aperçu que sur 485 patients de plusieurs pays, 4 % des cas surviennent suite à une très bonne nouvelle.
Les intestins peuvent aussi être perturbés quand il y a excès de joie ou de malheur. Un excès ou un manque de feu dans l’alimentation peut les enflammer. Par exemple, les légumes piquants sont liés au feu. En manger trop brûle le transit. Les légumes crus sont froids et ingurgités en grande quantité, vont aussi irriter le transit.
L’élément feu est d’une grande complexité. Son impétuosité peut être difficile à gérer, mais comme chaque élément, il a des garde-fous qui permettent d’en profiter pleinement.
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