La cathédrale gothique, qui vient de fêter ses 800 ans cette année, fait la fierté de la ville d’Amiens. Cette cathédrale colossale, la plus vaste de France, occupe depuis plusieurs siècles une place prépondérante dans le cœur des Amiénois. Elle est classée monument historique depuis 1862 et inscrite au patrimoine de l’Unesco depuis 1981.
Un chef d’œuvre construit en un temps record
La construction de la cathédrale d’Amiens a débuté en 1220, sous le règne de Philippe-Auguste, en partie sur l’emplacement d’une cathédrale plus ancienne qui venait d’être détruite par un incendie. C’est l’évêque d’Amiens de l’époque, Évrard de Fouilloy, qui a décidé de l’édification de la nouvelle cathédrale, en accord avec le clergé et le peuple. Les conditions étaient favorables pour une reconstruction, l’économie de la ville étant florissante et prospère. On envisage de construire une cathédrale beaucoup plus grande et plus imposante que la précédente, afin de pouvoir accueillir l’ensemble des fidèles.
Le commerce du blé et de la guède, une plante utilisée pour la production de teinture bleue, est en pleine expansion, et finance ainsi de façon notable l’immense édifice. D’autre part, les généreux donateurs ne manquent pas, allant des différentes corporations de métiers d’Amiens aux pèlerins de passage dans la ville. Toutes ces contributions permettent de bâtir le monument religieux en un peu moins de 70 ans, ce qui est prodigieux pour l’époque. En conséquence, la cathédrale conserve une unité architecturale tout à fait remarquable.
Amiens – Façade nord de la cathédrale. (Image : Wikimedia / VincentdeMorteau / cropped by MathKnight / CC BY-SA 2.5)
Mettre en valeur le savoir-faire français
Au Moyen Âge, on ne parle pas encore de style gothique, mais d’« opus francigenum », que l’on peut traduire par « architecture à la française ». En effet, l’architecture gothique est un style architectural d’origine française, qui s’est répandu au début de la seconde partie du Moyen-Âge au sein de l’Europe occidentale. De toute évidence, la cathédrale d’Amiens représente à merveille ce précieux savoir-faire.
Cet « opus francigenum » se caractérise par une recherche de hauteur et de luminosité. Un ingénieux système d’arcs-boutants et de voûtes a permis aux bâtisseurs d’élever la cathédrale toujours plus haut, défiant les lois de la pesanteur. Notons que les proportions de cette dernière sont tout simplement gigantesques : 145 mètres de long, 70 mètres de large au niveau du transept, pour une nef d’une hauteur de 42,30 mètres. Avec ses 200 000 mètres cubes de volume intérieur, on pourrait y placer deux Notre-Dame de Paris.
Cathédrale portail tympan et voussures – Amiens. (Image :wikimedia / Patrick Despoix / CC BY-SA 3.0)
Une myriade de sculptures à découvrir
La façade principale de la cathédrale est réputée pour la profusion considérable de ses sculptures, comme en témoigne tout d’abord le tympan, au-dessus de la porte centrale. Il est peuplé d’une multitude d’anges, de martyrs, de patriarches, de vierges, de musiciens... avec le Christ en son centre. Sur les soubassements de la façade, on peut apercevoir la représentation des signes du zodiaque. En dessous figure les mois correspondants, sous la forme de scènes agricoles.
Réparties sur les trois portails de la façade occidentale se trouvent d’admirables statues de saints ou de divers personnages bibliques. La célèbre statue du « Beau Dieu », nommée ainsi par les fidèles, trône devant l’entrée principale du monument catholique. Elle représente le Christ, bénissant de la main droite et portant le Livre, c’est à dire la Bible dans la main gauche. L’expression majestueuse et sereine qui se dégage de la statue, la noblesse du visage et l’élégance du drapé, en font un incontournable.
L’intérieur de la cathédrale contient aussi son lot de magnifiques sculptures. On peut ainsi découvrir une splendide chaire, surmontée d’un ange pointant son doigt vers le Ciel. Autour du chœur, une magnifique succession de tableaux sculptés, datant du XVIème siècle, retrace la vie de saint Firmin, considéré par les catholiques comme le premier évêque d’Amiens. Une autre série montre la vie de saint Jean-Baptiste.
De même, on peut aussi repérer plusieurs tombeaux, dont celui d’Évrard de Fouilloy et de Geoffroy d’Eu, tous deux évêques d’Amiens. Ces deux évêques ont eu un rôle essentiel dans la construction de l’édifice religieux. Leurs tombeaux ont la particularité d’être surmontés d’un gisant en bronze coulé d’une seule pièce. Ces derniers datent de la première moitié du XIIIème siècle, et sont les seuls gisants en bronze de cette période en France.
Chaire cathédrale d’Amiens. (Image : Wikimedia / Vassil / CC BY-SA)
Le labyrinthe de la cathédrale
Le dallage de la cathédrale comporte une grande variété de motifs dessinés. Bien que restauré au XIXème siècle, il a été conçu et pensé au XIIIème siècle. Parmi les motifs utilisés, on aperçoit, entre autres, le svastika, un symbole rencontré dans la plupart des civilisations du monde.
Le pavement de l’édifice catholique est également composé d’un vaste labyrinthe octogonal, d’une longueur de 234 mètres. Il était parcouru à genoux par les pèlerins venus vénérer les reliques de saint Jean-Baptiste, ou pour gagner des indulgences, c’était une substitution au pèlerinage en terre sainte. Le chemin du labyrinthe est parcouru d’un seul et même chemin. Cela relève d’une dimension symbolique : Dieu ne va pas égarer les fidèles, il va au contraire les guider sur le droit chemin. Ce chemin est très long et effectue de nombreux détours : il est à l’image de la foi de ces hommes du Moyen-Âge. Arrivés au milieu du labyrinthe, ils étaient considérés comme purifiés et pouvaient ainsi continuer leur marche dans la cathédrale.
Au centre du labyrinthe, on remarque une dalle octogonale, représentant les 3 maîtres d’œuvres de la cathédrale d’Amiens : Robert de Luzarches, Thomas de Cormont et son fils Renaud de Cormont. Un quatrième personnage les accompagne, il s’agit d’Évrard de Fouilloy, à l’initiative de ce grandiose monument. Cette dalle remplace l’originale, qui a été transférée au musée de Picardie.
Cette superbe cathédrale, fleuron de l’architecture gothique, n’a pas fini d’être admirée par les générations futures. Témoignage intemporel de l’amour des hommes pour le divin, elle est l’un des nombreux trésors patrimoniaux de la France.
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