De manière plus que respectable, l’église Saint-Eustache arbore ses huit cents ans au cœur de la capitale parisienne. Née dans le 1er arrondissement de la Ville Lumière, elle a été le théâtre des cérémonies les plus prestigieuses de notre histoire : le baptême du cardinal de Richelieu, celui de Molière, de Madame de Pompadour, ainsi que la première communion de Louis XIV ou les obsèques de Jean de La Fontaine et Mirabeau. Abordons de plus près l’histoire de l’église la plus visitée de Paris.
Saint-Eustache et ses 800 ans d’existence
À l’emplacement de l’église paroissiale actuelle existait dès le XIIIe siècle une modeste chapelle dédiée à Sainte Agnès, martyre romaine. Une fois érigée en église en 1224, elle devient paroisse puis se fait appeler église Saint-Eustache lorsqu’elle abrite quelques années plus tard les reliques du saint du même nom, lui aussi martyr romain.
Situé au cœur de Paris dans le quartier grouillant des Halles, l’édifice doit vite s’agrandir. La construction de l’église Saint-Eustache actuelle commence en 1532 sous le règne de François 1er qui aspire au grandiose. Avec ses dimensions impressionnantes, soit 88 mètres de long, 42 mètres de large, 33 mètres de hauteur, l’église parisienne s’apparente davantage à une cathédrale, à l’image de Notre-Dame de Paris, dont elle serait l’héritière, voire la rivale. Elle était d’ailleurs surnommée la « cathédrale des Halles ». Sa construction se poursuit jusqu’au XVIIe siècle pour aboutir à un majestueux monument où se mêlent divers genres : le style classique, le style Renaissance et le style gothique. Le poète Gérard de Nerval dans son œuvre Les nuits d’octobre, publié en 1858, s’exprimait ainsi à ce propos : « Cet admirable édifice […] avec son armature gothique, ses arcs-boutants multipliés comme les côtes d’un cétacé prodigieux, et les cintres romains de ses portes et de ses fenêtres, dont les ornements semblent appartenir à la coupe ogivale ».
Toutefois, pour des raisons financières, l’église Saint-Eustache est restée inachevée comme le prouve sa façade de droite jamais terminée en dépit de plusieurs restaurations réalisées en 1864 et plus près de nous en 2023.
L’église Saint-Eustache, réputée pour son orgue de taille gigantesque et sa collection de tableaux, attire des milliers de visiteurs. Implantée au cœur d’une véritable plaque tournante, elle voit défiler chaque année plus de 800 000 personnes.
La légende de Saint Eustache
Qui était donc Saint Eustache, celui qui donna son nom à la célèbre église ? Selon la tradition, Saint Eustache était un général romain, appelé Placide de son nom latin, très apprécié par l’empereur Trajan pour ses qualités militaires et humaines. Passionné de chasse, il aurait eu une vision un jour où il poursuivait un cerf.
Dieu lui aurait dit : « Placide, pourquoi me persécutes-tu ? C’est par faveur pour toi que je te suis apparu sous cette forme ; et je suis le Christ, que tu sers sans le connaître. Car tes aumônes sont montées jusqu’à moi ; et c’est pour cela que je suis venu, afin de te faire la chasse, par l’entremise de ce cerf à qui tu fais la chasse ! » Il s’agit d’un extrait tiré de La légende dorée, de Jacques de Voragine, relatant la conversion du général romain et de toute sa maisonnée. D’après la suite du récit, Placide prit alors le nom d’Eustache qui signifie « calme et tranquille » tandis que sa femme Tatiana s’appela Théopisté qui veut dire : « Celle qui croit en Dieu ».
Saint Eustache et sa famille ne tardent pas à subir de multiples épreuves. Après une courte période d’accalmie, ils sont de nouveau durement éprouvés et périssent en martyrs sous l’empereur Hadrien, refusant d’abjurer leur foi. Un cerf, porteur de crucifix, surplombant le cadran solaire qui orne l’église de Saint Eustache rappelle comment le saint d’origine romaine a embrassé la foi chrétienne.
L’église Saint-Eustache : un esprit d’ouverture et de solidarité
Dans une interview accordée à radio Notre Dame avant la célébration récente des 800 ans de Saint-Eustache, le curé de l’église paroissiale Yves Trochéris soulignait que ce monument représente « une page de l’histoire de Paris et (…) même de l’histoire de France ». L’évènement serait marqué par des spectacles, des visites guidées, des conférences et une messe solennelle. Il fallait célébrer l’anniversaire « dans la joie et la diversité ». Le Père Trochéris a ajouté que « la beauté du bâtiment n’est pas neutre », qu’elle « produit une émotion religieuse ». Il estime que l’église Saint-Eustache est animée d’un esprit d’ouverture doublé d’un engagement vers la solidarité.
Outre les 800 ans d’existence de l’église, l’année 2024 marquera les 25 ans de l’association Cerise, association d’insertion ou les 40 ans de l’association Soupe. Grâce à cette dernière, du 1er décembre au 31 mars, 300 repas chauds sont servis aux plus démunis. « Aller à la rencontre de l’autre par la création », tel est l’objet d’une autre association chère à Saint-Eustache : La Pointe. « Saint-Eustache est un lieu de culte, mais c’est un lieu qui accueille également dans un esprit d’ouverture et de respect de la liberté (…), de la liberté de l’autre » confie le Père Yves Trochéris.
Autre spécificité de l’église Saint-Eustache et non des moindres : son lien indéfectible avec le monde de l’art et des artistes. Le classique côtoie le contemporain. L’édifice parisien fourmille de chefs-d’œuvre s’étalant du XIVe au XXIe siècle.
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