Comment imaginer la vie sans cet accessoire si incontournable, le parapluie ? Il se loge facilement dans nos sacs, nos véhicules. S’en passer peut avoir des conséquences fâcheuses pour notre santé et notre bien-être, surtout sous des latitudes pluvieuses. L’invention du parapluie tel que nous le connaissons aujourd’hui est cependant quasi méconnue. Découvrons son incroyable histoire qui n’est guère étrangère à l’histoire de France, vous le verrez.
Un accessoire très proche de l’ombrelle
Née il y a probablement 4 000 ans en Mésopotamie, où le soleil et la chaleur représentaient une menace omniprésente, l’ombrelle est considérée comme l’ancêtre du parapluie. Des légendes égyptiennes et chinoises font allusion à cet accessoire millénaire fabriqué en papyrus, en feuilles de palmier ou encore en bambou. L’ombrelle, emblème de pouvoir et de puissance, était réservée aux classes supérieures. La lourdeur du dispositif nécessitait cependant l’aide de porteurs attitrés. En France, le mot « parapluie » serait apparu seulement au XVIIe siècle. Le vocabulaire d’usage instaure une certaine confusion entre l’emploi de parapluie et parasol employés indifféremment.
L’encyclopédie Diderot, datée de 1765, laisse entendre que « recouvert de toile cirée, l’ustensile s’appelle parapluie, recouvert de soie, parasol » ou bien dans un autre extrait, on peut lire : « c’est un ustensile qui sert à garantir de la pluie ou de l’ardeur du soleil : c’est pour cela qu’on l’appelle tantôt parapluie, tantôt parasol. » Pensons également à l’anglais qui désigne le parapluie par le mot umbrella, proche de « ombrelle ». Parasols, parapluies et ombrelles ne formaient qu’un seul et même accessoire dans l’imaginaire de nos prédécesseurs.
L’invention du parapluie tel que nous le connaissons
Ainsi donc, l’ombrelle ou le parasol avaient la part belle, tandis que l’accessoire permettant de se protéger de la pluie n’existait pas vraiment. Avant l’invention du parapluie tel que nous le connaissons, comment se protégeait-on en cas de pluie ?
Selon les historiens, les hommes se munissaient d’une grande cape se révélant peu efficace en cas d’averse. Quant aux dames, soit elles aussi portaient une grande cape ou bien elles se résignaient à rester à l’abri à la maison, renonçant à sortir. C’est alors qu’en 1705, un certain Jean Marius, un commerçant français, eut l’idée d’utiliser les mêmes procédés de fabrication en usage pour les bourses. « Il mit à profit son expérience de fabricant de bourses, un accessoire qui possédait à l’époque des fermetures métalliques complexes. Son parapluie était formé d’un tissu de taffetas vert, engommé pour le rendre imperméable, et disposé sur une structure métallique ressemblant à celle des parapluies actuels, qui permettait de l’ouvrir, de le fermer et de le plier. Il pesait entre 140 et 170 grammes et, une fois plié, on pouvait le mettre dans sa poche ou l’accrocher à sa ceinture. » peut-on lire sur le média Herodote.net.
Une véritable révolution
L’invention du parapluie fut couronnée de succès et saluée par le Roi Soleil en personne. Jean Marius, en homme d’affaires avisé, sut gérer la promotion de son « parasol-parapluie brisé à porter dans sa poche » et obtenir le soutien royal si précieux. « Le roi fut si impressionné par cet instrument qu’il promulgua en 1710 un privilège royal, l’équivalent des brevets modernes, garantissant à Marius le monopole de la production du parapluie pliant pour une durée de cinq ans. Ce privilège condamnait en outre quiconque le copierait à une amende de 1 000 livres, soit environ 40 000 euros. » selon la source citée plus haut. L’astucieux inventeur parisien ne tarda pas à s’enrichir …
La pluie n’effrayait plus et ne réduisait pas au confinement forcé. L’invention du parapluie constituait une véritable révolution dans le quotidien des usagers. Élisabeth-Charlotte de Bavière, née Princesse Platine, l’épouse de Philippe d’Orléans, frère de Louis XIV, écrivait en 1712 à ce propos : « le parasol-parapluye expéditif qu’on peut emporter partout, en cas où la pluie viendrait à vous surprendre en pleine promenade. »
Au bout des cinq ans de monopole, plusieurs artisans vont développer la fabrication des parapluies, s’inspirant des premiers modèles parisiens. L’accessoire, bien accueilli en premier lieu par la gente féminine, ne cesse de gagner en popularité. Les gentlemen britanniques réticents au début finissent par l’adopter. En France, le parapluie pour homme s’impose au XVIIIe siècle au point de se muer en accessoire de mode au temps de la Révolution.
Évolution, innovations et démocratisation
Le parapluie poursuit son ascension et séduit une clientèle aisée en quête de distinction. Au XIXe siècle, on peut parler de l’âge d’or du parapluie qui fait vivre près de 100 000 personnes, encadrées par environ 400 fabricants. La ville d’Aurillac, dans le Cantal, se bâtit une réputation de capitale du parapluie. Si les procédés de fabrication restent pratiquement inchangés depuis le XVIIIe siècle, les innovations suivent le cours du temps. De nouveaux matériaux font leur apparition. Les os de baleines laissent la place au bois ou à la fibre de verre, tandis que le taffetas est remplacé peu à peu par le polyester et le nylon au XXe siècle. Les parapluies à ouverture télescopique et autres s’imposent. Concernant de prime abord les classes fortunées, l’invention de Jean Marius finit par se démocratiser.
Le parapluie des temps modernes est devenu un produit de consommation de masse livré à une industrie délocalisée, voire débridée : en France, chaque année, plus de 10 millions de parapluies garnissent les poubelles et les caniveaux ! Cependant, quelques rares artisans gardent jalousement les secrets de fabrication pour donner vie à cet accessoire si familier. L’invention du parapluie cher à Jean Marius n’aura pas été vaine.
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