Louise de Savoie est surtout connue en tant que mère de l’illustre François 1er. Reine sans couronne, première régente de plein droit, Louise de Savoie a gouverné le pays d’une main de maître à plusieurs reprises. Nous allons, pour l’heure, mettre l’accent sur le parcours atypique de cette personnalité éminente, qui a si bien incarné la femme puissante de la Renaissance.

Louise de Savoie, une princesse au destin fabuleux
Fille de Philippe II, duc de Savoie, et de Marguerite de Bourbon, Louise de Savoie est née le 11 septembre 1476 au château de Pont-d’Ain dans la région correspondant au département de l’Ain. Rien ne la prédisposait à vivre à la cour de France. Cependant, ayant perdu sa mère à l’âge de 7 ans, elle est élevée par la fille aînée du roi Louis XI, Anne de Beaujeu ou Anne de France, éducatrice privilégiée de nombreuses princesses orphelines de l’époque. Louise de Savoie aura beaucoup d’admiration pour cette femme de tête capable de lui inculquer de solides valeurs morales et de lui transmettre une volonté de fer. Dès l’âge de 12 ans, elle épouse Charles d’Angoulême, de 16 ans son aîné. « À la fin de l’hiver 1488, la jeune femme rejoint son mari au château de Cognac, dont la cour est extrêmement cultivée. Leurs goûts intellectuels rapprochent les deux époux qui enrichissent leur bibliothèque de magnifiques manuscrits » peut-on lire sur le site Mare nostrum à propos du couple. La très jeune Louise peine à donner des héritiers à son époux, mais un saint homme lui prédit qu’elle aura un fils appelé à devenir roi. En réalité, elle aura d’abord une fille, Marguerite d’Angoulême, future reine de Navarre. Deux ans plus tard, le fils tant attendu, François, voit le jour le 12 septembre 1494 à Cognac sous le nom de François d’Angoulême.
«François, par la grâce de Dieu, roi de France et mon César pacifique, prit la première expérience de la lumière à Cognac », s’écrie l’heureuse mère Louise de Savoie, convaincue que le saint homme avait vu juste !
Dès lors elle s’évertue à préparer pas à pas l’ascension de son fils bien-aimé, héritier présomptif du trône de France, car le roi Louis XII, le cousin de François n’avait pas d’héritier mâle.

Louise de Savoie, éducatrice hors pair, humaniste dans l’âme
À 19 ans, Louise de Savoie se retrouve veuve. Elle refuse de se remarier, s’ingéniant à arborer un habit de deuil qu’elle ne quittera plus. Elle prend le parti de se consacrer entièrement à l’éducation de ses enfants, en accord avec sa devise Liber et liberis, c’est-à-dire : Pour des livres et pour des enfants.
Le biographe de François 1er, StephenHamilton, soutient : « il est donc fort plausible (…) que la mère de François d’Angoulême ait eu un rôle déterminant dans sa formation artistique ». C’est probablement Louise de Savoie qui fit de François l’emblématique prince de la Renaissance que nous connaissons, un homme aussi attiré par la chasse que par la poésie et les œuvres d’art. Un Florentin, faisant allusion au jeune François 1er tout juste âgé de 10 ans, écrivait au Marquis de Mantoue : « Monseigneur très illustre, comme je suis serviteur et familier de notre petit prince d’Angoulême, il m’a dit qu’il aimerait que je lui fisse venir quelques tableaux de ces maîtres excellents d’Italie, parce qu’il y prend grand plaisir. » Par ailleurs, Louise de Savoie fut également une éducatrice d’exception pour sa fille Marguerite, future femme de lettres accomplie.
« Elle ne put, à l’aurore du XVIe siècle, et avec les faibles moyens dont on disposait alors, recevoir une culture approfondie. Même pour l’époque, cette culture fut exceptionnelle, a expliqué Pierre Bourda, le biographe de Marguerite concernant l’éducation que reçut cette dernière.

Une Régente de plein droit qui fait ses preuves
Le cousin de François 1er, Louis XII, meurt sans héritier mâle. Le 25 janvier 1515, François est sacré roi de France à Reims. Sa mère Louise savoure sa victoire. Le sacre ne fait que renforcer la relation quasi fusionnelle existant entre la mère et le fils. Pour François 1er, sa mère représentait « le modèle de la princesse chrétienne et humaniste, dans le plus parfait héritage de Christine de Pisan ». Àpeine devenu roi, il l’a élevée au rang de duchesse d’Angoulême et de duchesse d’Anjou. Il lui accorda deux fois la régence lorsqu’il partit en campagne de guerre. Une première fois en 1515, où il revint victorieux de la fameuse bataille de Marignan, elle n’avait pas les pleins pouvoirs, car François avait gardé le sceau royal. Mais la seconde fois, dix ans plus tard, en 1525, après la cuisante défaite française à Pavie le conduisant à la captivité, Louise de Savoie a tenu d’une main ferme les rênes du royaume. Politicienne avisée, elle réussit à négocier avec le rival Charles Quint la libération du roi humilié. En cela elle fut secondée par sa fille Marguerite. François 1er fut libéré, mais ses deux enfants furent maintenus en otage. Il s’agit du traité de Madrid signé le 15 janvier 1526. C’est au cours de cet épisode peu reluisant que François 1er, dans l’une des nombreuses missives adressées à sa mère, a lâché la formule célèbre : « De toutes choses ne m’est demeuré que l’honneur et la vie qui est saulve ».
Puis un autre traité, connu sous le nom de paix des Dames, vient couronner le parcours politique de Louise de Savoie. Signé et conçu par elle-même et par Marguerite d’Autriche, qui est à la fois sa belle-sœur, son amie d’enfance et la tante de Charles Quint. Le traité signé à Cambrai le 5 août 1529 mettait fin aux hostilités entre les deux cousins rivaux en terre italienne.
Un pouvoir royal dévolu à une reine sans couronne
L’influence de Louise de Savoie ne se limite pas aux périodes de régence. En dehors de ces épisodes historiques, Louise de Savoie siégeait au conseil du roi, fait exceptionnel. On raconte que François 1er signait ses écrits « le Roi et Madame », tandis que Louise de Savoie, pour sa part, signait « À mon seul plaisir », formule employée exclusivement par les souverains. Elle détenait le pouvoir aux côtés de son fils, elle qui n’avait jamais été couronnée…
De plus, Louise faisait et défaisait des carrières, recevait des princes et des princesses. Outre un pouvoir politique affirmé, parfois controversé, Louise de Savoie a étendu son influence dans le domaine des arts, en littérature, en peinture aussi bien qu’en architecture. Propriétaire de plusieurs châteaux, elle les faisait rénover. Elle invitait des érudits renommés. Elle n’est pas étrangère au séjour d’un certain Léonard de Vinci au château d’Amboise …
Louise de Savoie meurt le 22 septembre 1531, épuisée par la maladie. François 1er, dévasté par cette disparition survenue de surcroît en son absence, ordonna des obsèques royales pour celle qui ne fut jamais reine mais qui néanmoins œuvra de manière à propulser son « Caesar triomphant » sur le trône. Aux dires de certains intéressés, l’illustre souverain n’aurait jamais accédé au trône de France sans le soutien indéfectible d’une mère entièrement dévouée à sa cause. À l’époque où le pouvoir féminin n’était guère au goût du jour, Louise de Savoie aura su tisser la toile d’un pouvoir réel mais quasiment oublié par l’histoire.
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