Monsieur Nizier Philippe était connu dans toute l’Europe jusqu’en Russie pour son don de guérisseur. Thaumaturge mystique, il demandait aux malades qui venaient le consulter pour être guéris de ne plus dire du mal des autres et d’aimer son prochain comme soi-même, en échange de ses soins.
Monsieur Nizier Anthelme Philippe est communément appelé Monsieur Philippe, Maître Philippe, Maître Philippe de Lyon. Ce qui est relaté à son sujet provient de témoignages, dont certains sont notariés, et de documents consignés par la police.
La vie de Monsieur Philippe
Philippe Nizier est né à Loisieux, un village savoyard, le 25 avril 1849. Il est décédé le 2 août 1905 dans sa demeure de L’Arbresle, une commune située près de Lyon, probablement d’une crise cardiaque.
Ses parents, Joseph Philippe et Marie Vachod, sont de petits fermiers. Il est l’aîné de cinq enfants. Il grandit à la ferme, aidant ses parents et apprenant les rudiments scolaires avec le curé d’Ars. Monsieur Philippe racontera à un journaliste que vers l’âge de treize ans, il a guéri plusieurs de ses camarades.
À l’âge de quinze ans, Philippe Nizier est envoyé chez son oncle maternel, qui est boucher dans le quartier de la Croix Rousse à Lyon. Il y travaille comme commis. Parallèlement, il étudie pour obtenir un certificat de grammaire. Ce quartier est celui des canuts, ces ouvriers tisserands qui filent la soie, Lyon étant alors la capitale mondiale de la soie. Monsieur Philippe se fait vite connaître auprès des canuts qui, après être venus le consulter pour des maux que les médecins ne peuvent pas guérir, rentrent chez eux en bonne santé.
Durant la guerre qui oppose la France à la Prusse, en 1870, il soulage les malades dans le quartier Perrache à Lyon. Certains disent qu’il a des dons d’alchimiste. En 1872, il ouvre un laboratoire dans lequel il compose d’abord des teintures pour la soie, puis des médicaments qu’il fait breveter. Le succès est au rendez-vous, à la fin de sa vie, il aura quatre laboratoires. Il y soigne également les gens qui en font la demande. Son activité soulève la méfiance. Il semblerait que la police le surveillait déjà.
En 1874, il s’inscrit à la faculté de médecine et de pharmacie à Lyon. Un an plus tard, il est contraint d’interrompre ses études, car il est dénoncé pour pratique illicite de la médecine. Ces accusations portent sur des guérisons miraculeuses rapportées par les médecins sur place.
La même année, Monsieur Philippe fait connaissance avec la famille Landar, une famille d’industriels reconnus. En 1877, il épouse leur fille, Jeanne. Ils auront deux enfants, Victoire, née en 1878 et Albert, né en 1880 et décédé trois mois plus tard. Jeanne n’a pas une bonne santé, Monsieur Philippe prendra soin d’elle toute sa vie. Devenu riche, il continue à soigner les gens gratuitement.
À partir de 1883, Monsieur Philippe ouvre un cabinet dans son hôtel particulier au 35 rue Tête-d’Or à Lyon. Il est maintenant célèbre et les gens font la queue devant sa porte. Certains jours, il reçoit plus d’une centaine de personnes, et cela durant 22 ans. Monsieur Philippe dort très peu, il semblerait qu’il ne dorme qu’à peine une heure par jour. Il reçoit tous les jours, sauf le dimanche et les jours fériés.
En 1884, il obtient par correspondance un titre de docteur en médecine de l’université américaine de Cincinnati mais qui ne sera pas reconnu en France.
En 1899, le tsar Nicolas II lui décerne le titre de docteur en médecine de l’académie impériale de médecine militaire de Saint-Pétersbourg, titre qui ne sera pas reconnu en France. À l’inverse, il sera condamné à trois reprises à payer une amende pour exercice illégal de la médecine. De plus, la surveillance est renforcée. La police le soupçonne d’être un espion.
Il rencontre beaucoup de têtes couronnées, en Tunisie, en Italie, au Monténégro, en Prusse, au Royaume-Uni. Partout, il fait l’admiration de ceux qui en bénéficient et l’hostilité des crédules.
En 1903, Philippe Nizier annonce que son disciple, Jean Chapas, lui succédera dans les guérisons jusqu’en 1922. Ce dernier meurt en 1932.
Monsieur Philippe reçoit des décorations et des titres de l’Acri, ville italienne, de Tunisie, de l’académie Mont-Réal de Toulouse, des sapeurs-pompiers de L’Arbresle, de la Croix-rouge. L’Académie Royale de Rome lui confère entre autres le titre de Docteur en Médecine honoraire. Alors qu’il a été diffamé tout au long de sa vie, à sa mort, la presse va l’encenser, en parlant de lui comme d’un homme qui a fait le bien et aidé beaucoup de gens.
Témoignages des guérisons accomplies par Monsieur Philippe
Dans un premier temps, les consultations sont gratuites mais les rumeurs allant bon train, Monsieur Philippe va demander trois francs à l’entrée. Tous les soirs, il distribue l’argent récolté aux démunis. Il a le don de savoir qui en a besoin. Il aide aussi financièrement des familles dans le besoin. À sa mort, on découvre qu’il payait le loyer de cinquante-deux familles indigentes.
Des maîtres de l’occultisme viennent le rencontrer. Cette visite va changer leur façon de voir les choses et beaucoup vont retrouver une vraie démarche spirituelle dans le christianisme. Certains sont même devenus de véritables mystiques. Monsieur Philippe condamne à plusieurs reprises l’utilisation des sciences occultes. Cela ne l’empêchera pas d’être accusé d’y avoir recours.
Malheureusement, il ne lui est pas possible de soigner sa famille, hormis sa femme. Il dit que seul Dieu peut le faire. C’est un déchirement quand il perd son fils et encore plus quand sa fille meurt de la tuberculose en 1904. Il ne s’en remettra pas.
Monsieur Philippe explique qu’il se sert d’une force dépassant tout entendement, utilisée par le Christ lui-même. Il la décrit ainsi « Ce n’est pas un courant, mais plutôt une lumière, elle représente " aimez-vous les uns les autres. " » Il n’appose jamais ses mains, il dit toujours qu’il est un intermédiaire et que c’est le Christ ou Dieu qui guérissent. Il pense que la matière est vivante, « toute matière est vivante, elle est intelligente, elle sent, elle a une mémoire, elle est capable de discernement, elle est capable de choix. »
Monsieur Philippe ressuscite un enfant du nom de Jean Chapas, atteint d’une méningite à l’âge de sept ans. Deux médecins attestent de son décès. Arrive Monsieur Philippe. Selon le témoignage de Jean Batiste Ravier, un menuisier sur place : « Monsieur Philippe, alors âgé d’une vingtaine d’années demande à madame Chapas qu’il connaissait bien, si elle lui donne son fils. Après son accord, Monsieur Philippe se recueille et dit à l’enfant : je te rends ton âme. L’enfant retrouve vie. » Devenu adulte, Jean Chapas deviendra son disciple. Monsieur Philippe lui aurait sauvé une deuxième fois la vie, alors qu’il était victime d’une fièvre typhoïde. Certains témoignages parlent d’autres résurrections.
Plusieurs canuts déposent leurs témoignages devant notaire pour l’aider lors d’un procès. Ils certifient qu’aucun médecin ne pouvait les guérir mais que Monsieur Philippe les a sauvés sans même les toucher et qu’il soigne même à distance. Ils confirment également qu’aucun n’a versé un centime pour leur guérison. Riche ou pauvre, Monsieur Philippe demande à tous de faire des efforts pour ne pas dire du mal de son prochain mais de rendre le bien pour le mal.
Tous les témoins sont des gens dignes de foi, par exemple Claude Laurent est huissier de justice, un homme tout à fait cartésien, présent lors des séances de Monsieur Philippe, il témoigne en sa faveur.
Selon Alfred Haehl, médecin, quand Monsieur Philippe étudiait à la faculté de médecine, « Monsieur Philippe dit à un malade qui doit subir une amputation, que celle-ci ne se fera pas. Le lendemain, le chirurgien constate que sa jambe est en voie de guérison. Il aurait dit à trois soldats atteints par la typhoïde et à l’article de la mort que le lendemain, ils seraient en convalescence, ce qui est arrivé. »
Paroles en vrac de monsieur Philippe
Le film de Bernard Bonnamour, Maître Philippe de Lyon, le chien du berger, raconte beaucoup d’anecdotes et relate, d’après les témoignages, les paroles de Monsieur Philippe. Parmi celles citées ci-dessous, plusieurs sont extraites du film.
Il disait « pour soulager les malades, il faut demander à Dieu le pardon des malades et au même instant les malades se sentent soulagés et par la suite, leur corps se sent soulagé. Si on avait la foi, on se soignerait tous les uns les autres. »
Il croyait en la réincarnation. Il disait qu’il se souvenait avoir déjà vécu, être venu puis reparti. Il disait aussi que la plus grande preuve de la justice de Dieu est ce temps qu’il nous donne pour racheter nos fautes. « Seule la souffrance permet à l’âme de s’élever. Si nous connaissions la raison de nos souffrances, la récompense qu’elle apporte, nous serions tellement heureux que nous ne sentirions plus la douleur. »
Pour lui, la souffrance est la conséquence des actes et des paroles qui ont blessé d’autres personnes. Pour améliorer la situation, il faut faire le bien, notamment ne pas dire, ni même penser du mal des autres.
Il reconnaît le Christ comme étant Dieu. Il demande de prier les uns pour les autres. Son message est celui de l’évangile et il ne cesse de parler de l’évangile. Quand il demande le pardon pour les malades, il demande de prendre sur lui ces maux si nécessaire.
Il disait « Ne croyez pas que je vous apporte quelque chose de nouveau, tout ce que je dis est inscrit dans l’évangile mais voilé à dessein. » Il a dit aussi « bien que les évangiles aient été modifiés, le sens n’a pas été altéré, Dieu ne l’aurait pas permis. Si j’avais voulu, j’aurais pu fonder une religion, si celle du Christ n’avait pas existé je l’aurais créé. »
« Beaucoup d’entre vous pensent que je suis Jésus, détrompez-vous, je suis le chien du berger et le plus petit d’entre vous, et c’est parce que je suis petit que Dieu exauce toujours mes prières. »
Il disait à ses proches « Ne cherchez pas le repos, cherchez les ignorants, les incrédules, les méchants, les perfides, les malades et guérissez-les en donnant de vous-même. C’est difficile, douloureux. Quand vous êtes épuisé, retrouvez-vous seul à prier. La force et la vigueur vous reviendront. »
« Il est important de prier pour demander la force et le courage, de demander le soulagement de nos souffrances seulement lorsque celles-ci sont intolérables et nous empêchent d’agir. »
« La naissance est identique à la mort qui n’est rien qu’une simple apparence. »
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