Nouvelle année, nouveau calendrier, nouvel almanach. Comment distinguer ces trois réalités liées à l’organisation du temps ? Comment l’almanach s’est-il imposé pour devenir une tradition incontournable dans le patrimoine français ? Avec cet article, nous allons proposer quelques éléments de réponse.
Origines lointaines
Si l’on s’en tient à la définition du Larousse, l’almanach est un « livre populaire publié chaque année et comportant des renseignements scientifiques ou pratiques ». Sur le plan étymologique, le mot « almanach » vient du latin médiéval almanachus qui signifie « calendrier » et probablement de l’arabe andalou al-manak qui veut dire « moment dans le temps ». Les manuscrits d’almanachs ont existé depuis l’antiquité. Originaires de la Grèce antique, les plus anciens datent du IVe siècle av. J.-C. Leur diffusion s’est largement répandue à partir du développement de l’imprimerie.
C’est en 1474 à Nuremberg que fut imprimé le premier almanach. En France, les premiers almanachs apparaissent au XVIIe siècle, sous le règne de Louis XIV. Molière y fait allusion grâce au personnage de Monsieur Jourdain s’adressant au Maître de philosophie : « Après, vous m’apprendrez l’almanach pour savoir quand il y a de la lune et quand il n’y en a pas. » (Le Bourgeois Gentilhomme, Acte II, scène 4). L’Almanach royal tenait lieu d’annuaire et fournissait la liste des grands noms de l’administration et de la Cour. Né en 1683, il va se poursuivre jusqu’en 1919 sous diverses appellations.
L’almanach vecteur du savoir
Du XVe au XXe siècle, l’almanach connaît une popularité croissante : après la Bible, il figure parmi les ouvrages « les plus imprimés et les plus lus ». Les colporteurs les diffusent dans tout le pays. Servant à l’origine à informer le public sur les fêtes religieuses, les lunaisons, les changements de saison, les almanachs, au fil du temps, renseignent sur une foule de conseils pratiques comme les recettes culinaires, les prévisions astrologiques, le jardinage, etc… et divers savoir-faire traditionnels. Journalistes avant la lettre, les éditeurs d’almanach, pour susciter la curiosité des lecteurs, se sont mis à ajouter au sommaire des évènements qui s’étaient déroulés l’année précédente. L’almanach leur donne l’occasion de mêler « la petite histoire et la grande Histoire ».
Souvent unique ouvrage imprimé au sein de la famille paysanne, l’almanach s’impose comme vecteur puissant du savoir et de la transmission au sein d’une population animée par la soif d’apprendre… L’almanach se diversifie selon les régions, les métiers, les thématiques et on voit fleurir des almanachs en tous genres.
L’almanach moderne, gardien de la tradition
Qu’en est-il de l’almanach du XXIe siècle, comment a-t-il pu résister à l’emprise incontestable du numérique ? L’almanach est, dit-on, une spécificité française unique au monde. À titre d’exemple, le dernier almanach du Dauphiné, édité en 2024, est décrit comme « un joyeux télescopage du passé et du présent, d’anecdotes historiques et de conseils pratiques, tout à la fois recueil de la mémoire dauphinoise et guide du quotidien ».
Parallèlement, la présentation de l’Almanach Ardéchois 2024 révèle que « l’almanach de l’Ardèche a la besace bien remplie d’informations uniques qui plongent le lecteur au cœur de sa région. Anecdotes historiques, monuments ou sites célèbres, personnages illustres, recettes traditionnelles, autant de richesses dans l’almanach qui contribuent à façonner l’identité et la singularité Ardéchoise ».
À propos de l’almanach Rustica 2024, nous lisons dans un reportage récent que « cette édition 2024 nous fait (re)découvrir les villages de France, leurs patrimoines, traditions, produits du terroir ainsi que les gens qui y vivaient. » Les almanachs Rustica, créés en 1929, sont fort appréciés par les passionnés du jardin et de la maison. Ils plaisent également à « tous les curieux du savoir ».
Il faudrait ajouter à cette liste non exhaustive l’almanach du facteur, tradition « franco-française » où selon la coutume, à la fin de l’année, le facteur distribue aux usagers un almanach commandé par ses soins, en échange d’un petit geste symbolique. La paternité du calendrier postal apparu en 1854 revient à l’imprimeur François Charles Oberthur. L’almanach du facteur, appelé également almanach des Postes, perpétue non seulement un savoir-faire mais un lien social indéfectible existant entre le facteur et l’ensemble des usagers.
En définitive l’almanach a l’avantage de tisser des liens de divertissements, de savoir et de transmission.
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