« Si l’abeille disparait de la planète, l’homme n’aura plus que 4 années à vivre ». C’est une théorie défendue depuis plus d'un siècle par notre illustre Albert Einstein, qui a rapproché l’effondrement massif des colonies d’abeilles à celle des hommes.
Nous avons interrogé Jean-Noël Beverini, ancien président de l’ANMONM, l’Association Nationale des Membres de l’Ordre National du Mérite, de la Section des Bouches-du-Rhône, Commissaire en chef (H) de la marine nationale, ayant navigué en Méditerranée, dans l’Océan Indien, la Polynésie Française entre autres. Auteur d’ouvrages maritimes et de poèmes, défenseur du patrimoine. Ancien responsable des collections du Conservatoire de la marine nationale. Élu membre associé de l’Académie du Var en 2006 et membre de l’Académie des Sciences, Lettres et Arts de Marseille en 2007. Correspondant de la Revue Abeilles et Fleurs de l’Union Nationale l’Apiculture Française (UNAF), pour nous faire découvrir cet animal si familier.
La réflexion de Jean-Noël Beverini vous est livrée ici à travers les écrits de l’histoire, mais aussi par sa perception dans la connaissance de cet insecte, indispensable à la survie de l’homme.
L’abeille est un insecte vital pour l’homme
Il est indéniable que les abeilles jouent un rôle crucial dans la biodiversité et la survie de l’humanité. Le lien entre la pollinisation assurée par les abeilles et la production alimentaire est étroit, car de nombreuses cultures dépendent de la pollinisation pour produire des fruits et des légumes. La menace actuelle qui pèse sur les abeilles, en raison de facteurs tels que les pratiques agricoles intensives, l’utilisation de pesticides et les changements d’affectation des terres, a des implications profondes pour l’écosystème et la sécurité alimentaire.
Selon le site France Nature Environnement, 80% des insectes volants ont disparu en 30 ans, principalement victimes des pesticides. France Nature Environnement Bouches-du-Rhône agit pour sa préservation et plus largement pour la préservation de la nature et de la biodiversité.
L’ONU souhaite promouvoir une action coordonnée à l’échelle mondiale pour sauvegarder les pollinisateurs sauvages et domestiques et encourager l’utilisation durable des services de pollinisation.
L’abeille est présente depuis la plus haute Antiquité
L’apport historique et culturel des abeilles ne peut être sous-estimé. Depuis l’Antiquité, les abeilles ont été appréciées pour leur production de miel, de cire et autres produits dérivés.
Jean-Noël Beverini précise que nous connaissons tous l’abeille, « cet animal noble de l’ordre des Hyménoptères qui, comme un chevalier portant épée, appartient au sous-ordre des porte aiguillon. Les mâles, en revanche, en sont dépourvus. Lorsque l’abeille pique, avec son aiguillon à pointe barbelée, elle ne peut plus le retirer. Elle va même y laisser une partie de son abdomen et mourir instantanément » !
Les abeilles vivent en colonie, à côté de la Reine, appelée aussi « la Mère ». Parmi elles se trouvent « les mâles ou encore les faux bourdons. Ils sont trapus et très velus. Presque une caricature. Gros et pleins de poils ! Avec deux énormes yeux si développés qu’ils se touchent l’un et l’autre. En vieux français, nos ancêtres du Moyen Âge désignaient nos faux bourdons par le terme de " Malot ". Nous reconnaissons bien la sonorité rauque du mâle dans cette vieille appellation de Malot ».
Cette description de Jean-Noël Beverini nous rappelle certaines situations bien familières. Il précise également, « qu’au sein de la colonie travaillent surtout les ouvrières. Elles sont petites, petites comme on imagine ces femmes des campagnes ayant dû quitter leurs fermes pour venir s’engager par nécessité dans les usines des villes tout au long du XIXe siècle. Ce sont elles qui sont employées à la fabrication du miel et à l’éducation des jeunes. Leurs pattes arrière sont équipées d’une fossette qui sert à porter vers la ruche le pollen qu’elle vient de recueillir ».
« L’abeille est le seul être qui sait parler aux fleurs »
Cette affirmation « poétique » de Jean-Noël Beverini nous donne un aperçu bref du cheminement de l’abeille dans sa ruche et du parcours qu’elle gravira pour protéger sa reine et apporter le pollen nécessaire à la fabrication du miel.
« La vie de l’abeille est très courte » dit-il, car elle ne vit que quelques semaines. « Dès sa naissance, elle se met au travail. Sa première tâche est d’entretenir la ruche, de nourrir et s’occuper de la Reine, puis elle deviendra " ventileuse " : car la température intérieure du lieu doit toujours être constante et maintenue entre 11 et 12 degrés. Quand celle-ci monte, les abeilles bruissent de leurs ailes pour ventiler la maison ».
L’abeille aime les fleurs et ne peut vivre sans elles. Et les fleurs ne peuvent vivre sans les abeilles. « Dans sa si courte vie, l’abeille va effectuer plus de 17 000 voyages hors de la ruche pour butiner. Elle va ainsi visiter 8 700 000 fleurs ! Cela représente plus de 7 000 heures de travail de jour : de jour car la nuit, elle ne voit pas dans l’obscurité, malgré ses cinq yeux. Elle doit donc regagner sa ruche avant le coucher du soleil. La sentinelle postée sur le pont d’envol la reconnaît et la laisse rentrer ».
Puis, il évoque le rôle joué par l’abeille dans l’Antiquité et au cours des siècles : « Dès le Moyen Age la cire est utilisée pour frapper de sceau les documents officiels. Au XIIe siècle, l’ajout de colorants permet d’obtenir des cires de teintes différentes : l’emploi de sulfure de mercure donne une cire de couleur rouge, de l’ambre pulvérisé, une couleur jaune, l’oxyde de cuivre produit une cire de belle couleur verte, tandis que du noir de fumée la rend la plus sombre possible. Le cachet de cire, en fonction de son empreinte et de sa couleur, authentifie un acte officiel. Deux personnages d’importance entrent à la Cour du roi de France : le Chauffe cire, d’une part, et le Cirier de la Grande Chancellerie, de l’autre : ce dernier ayant pour mission de conserver les sceaux de cire royaux. (….) Il applique non seulement le sceau du roi sur tous les actes officiels, mais encore la cordelette, appelée Lac (de lacet) ou Lambeau ou encore Queue. La couleur de la cire et du Lac n’est pas sans importance ».
Nos abeilles étaient-elles loin d’imaginer que leur cire serait utilisée par les hommes et par les plus puissants du monde.
« Au cœur de notre Moyen Âge, n’oublions pas, tous nos monastères, toutes nos abbayes étaient d’énormes producteurs de miel et de cire, l’Église étant elle-même une grande consommatrice de cierges. Le miel est le sucre du temps, et ce temps est celui des siècles. L’invention du sucre blanc à partir de la betterave ne date que de l’an 1600 avec Olivier de Serres. Et de plus, au départ, le sucre de betterave n’était pas rentable ».
L’auteur rappelle l’utilisation de la cire à travers l’histoire de l’humanité, pour fabriquer nos engins les plus importants, comme les navires, les avions, les châssis de voiture, les skis, les prothèses des hanches, les cabines d’ascenseurs, etc… À toutes les étapes, l’abeille a participé au développement technologique de l’humanité.
Une approche à la fois touchante et didactique de nos amies les abeilles, qui force notre respect et nous conduit à une perspective plus responsable à l’égard de cet insecte et des sociétés d’apiculture qui se livrent à un réel combat pour leur survie. Nul doute, que les associations écologiques de lutte contre les insecticides et de défense pour la préservation des abeilles, agissent avec raison et discernement, pour préserver notre environnement, et nous avons tous et chacun en ce qui nous concerne, une responsabilité en la matière.
Article réalisé avec le concours de J.N Beverini
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