L’entreprise britannique Oxitec, spécialisée dans la lutte biologique contre les parasites, affirme avoir découvert un moyen d’appliquer le génie génétique (GE) aux insectes afin de lutter contre les maladies transmises par les moustiques.
Bien que le projet ait été approuvé par l’Environmental Protection Agency (EPA), diverses inquiétudes ont été soulevées quant à la nécessité et à la fiabilité d’utiliser des moustiques génétiquement modifiés.
Interruption du cycle de reproduction
Le programme d’Oxitec consiste à modifier génétiquement des moustiques mâles en les dotant d’un gène destiné à réduire certaines populations de moustiques, pour prévenir les maladies transmises par les moustiques.
Selon l’épidémiologiste Thomas Scott, « l’objectif du projet n’est pas de tuer les moustiques » (bien que ce soit le résultat final). « Il s’agit d’empêcher les gens d’être infectés, d’être malades et de mourir. »
Les scientifiques s’attendent à ce que les moustiques GM mâles relâchés s’accouplent avec les femelles. Le gène implanté est censé détruire les larves qui se transformeraient en moustiques femelles piqueuses, ne laissant survivre que les mâles non piqueurs. Avec le temps, les moustiques mâles n’auraient plus de partenaire et l’espèce finirait par disparaître.
L’effort scientifique se concentre exclusivement sur l’Aedes aegypti, une espèce invasive de moustiques liée à la propagation de maladies virales telles que la fièvre jaune, le chikungunya et la dengue. Il est également considéré comme un vecteur du Zika, un agent pathogène sujet à une transmission prénatale pouvant entraîner des malformations congénitales, et du virus du Nil occidental (VNO), la maladie transmise par les moustiques la plus courante aux États-Unis aujourd’hui. Le CDC a enregistré 2 695 cas de VNO en 2021, entraînant 191 décès.
Selon le département de la santé publique de Californie, la population d’Aedes aegypti a vu son nombre augmenter régulièrement dans 21 comtés au cours des dernières années.
Un projet approuvé et en cours
Le projet d’Oxitec a été approuvé par l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA), et la société prévoit de lâcher environ 2,4 milliards de moustiques génétiquement modifiés en Californie et en Floride d’ici à 2024.
En plus du plan actuel, Oxitec espère étendre ses opérations en Floride et lancer un nouveau projet pilote dans la Central Valley, en Californie, bien que tout nouveau lâcher nécessitera l’autorisation des « organismes de réglementation de l’État et des districts locaux de lutte contre la maladie. »
Selon l’EPA, « il est peu probable que la population locale de moustiques présente un risque accru pour les humains ou l’environnement. »
La résistance du public
Bien que Natalie Kofler, conseillère pour l’initiative de citoyenneté scientifique à la Harvard Medical School, et Jennifer Kuzma, codirectrice du Genetic Engineering and Society Center, aient affirmé dans le Boston Globe que « les avantages potentiels des moustiques génétiquement modifiés pourraient l’emporter sur les risques écologiques inconnus », le projet a suscité des critiques de la part du public.
Environ 13 000 commentaires ont été adressés à l’EPA pour s’opposer au projet, exprimant des inquiétudes quant à ses effets négatifs potentiels, ses motivations politiques et sa nécessité.
Selon Natalie Kofler et Jennifer Kuzma, les habitants de Floride « ne s’inquiètent pas trop des infections virales de la dengue et du chikungunya, parce qu’elles ne représentent pas une grande menace ».
Le département de la santé de Floride considère que les symptômes de la dengue sont de « légers à nuls ». le Dr Eva Buckner de l’Université de Floride a déclaré que seuls 95 cas de dengue ont été enregistrés dans l’État en 2020, dont 25 importés et 70 transmis localement.
Certaines des critiques concernent une subvention de 1 614 272 dollars accordée par la Fondation Bill et Melinda Gates en septembre 2020, pour financer des essais de moustiques en Afrique et en Amérique. Les préoccupations concernent les raisons pour lesquelles des essais seraient nécessaires en Amérique du Nord, alors que 90 % des maladies transmises par les moustiques ont lieu en Afrique.
Selon les Amis de la Terre, l’EPA n’a pas publié les données relatives aux anciens essais sur le terrain en Floride ou au Brésil concernant leur impact sur la santé publique, « y compris l’allergénicité et la toxicité », et a même expurgé ces informations de leur demande d’autorisation. Le groupe de défense de l’environnement s’est également plaint du fait que l’EPA n’avait pas mis en place un groupe consultatif scientifique indépendant pour ces essais, comme elle le fait pour certains pesticides.
« Les moustiques génétiquement modifiés pourraient entraîner beaucoup plus de problèmes de santé et d’environnement qu’ils n’en résoudraient », a déclaré Dana Perls, responsable du programme des Amis de la Terre, ajoutant que « l’efficacité à 100 % n’existe pas en science ».
Oxitec a déjà effectué des tests sur des moustiques génétiquement modifiés au Brésil, au Panama, aux îles Caïmans et en Malaisie.
Rédacteur Fetty Adler
Collaboration Jo Ann
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