Cyrus le Grand, premier véritable empereur de l’Histoire, dans la Perse du VIe siècle av. J.-C., se montra, dans ses nombreuses conquêtes, à la fois habile et humain. Il était digne d’admiration dans l’art de gouverner les hommes. Son éducation eut certainement un rôle important dans ses grandes capacités à diriger.
L’esprit de tolérance de Cyrus le Grand
Cyrus le Grand (580 av. J.-C. - 530 av. J.-C.) domina de nombreuses nations, de nombreuses villes et des myriades d’hommes qui lui obéirent. Son règne prouva qu’il n’était pas impossible ni même si difficile de gouverner des peuples très différents sur un vaste territoire, en s’y prenant avec adresse.
Cyrus partit à la conquête d’autres nations indépendantes de l’Asie, avec une petite armée de Perses. Il devint bientôt chef des Mèdes et des Hyrcaniens qui se hâtèrent de lui obéir. Il soumit les Syriens, les Assyriens, les Arabes et un grand nombre d’autres peuples. Puis il s’imposa aux Grecs d’Asie.
Des hommes, pourtant éloignés de journées ou même de mois de marche, décidèrent d’obéir à Cyrus, certains ne l’ayant même jamais vu. D’autres voulaient être ses sujets, tout en sachant qu’ils ne le verraient jamais. Ainsi, Cyrus devançait-il de très loin les autres rois de la région par son immense popularité et la confiance qu’il inspirait.
Conquête après conquête, il sut se faire apprécier par les peuples soumis. Personne ne voulut cesser d’être gouverné par ce grand roi. C’est pourquoi il réussit à réunir autant de nations sous son égide.
Ces nations qu’il conquit avaient chacune leur propre culture. Cyrus respectait les particularités. Il était tolérant envers leurs traditions et leurs religions. C’est ce qui le différencia des autres conquérants de son époque.
Des lois perses et une éducation contribuant au bien public
Le père de Cyrus était Cambyse, roi de Perse. Sa mère était Mandane, fille d’Astyage, roi des Mèdes. Cyrus était beau de visage, d’un caractère noble, aimant l’étude jusqu’à l’extrême fatigue, et la gloire jusqu’au péril de sa vie. C’est ce qu’on disait de lui.
Il fut élevé selon les lois perses. Ces lois semblaient être faites dans un souci du bien public. Chez les peuples voisins de la Perse, les parents élevaient leurs enfants comme ils le voulaient, et les plus âgés se conduisaient comme ils l’entendaient. Néanmoins, la justice y était faite et le vol, les effractions, la violence injustifiée, l’adultère, la désobéissance aux autorités étaient punis.
Les lois perses, elles, allaient plus loin et voulaient se prémunir du mal, afin que les citoyens ne soient pas entraînés vers des choses mauvaises. Ainsi, il s’était établi une école commune de justice où l’éducation et l’apprentissage amenaient les jeunes Perses à devenir exemplaires.
Il y avait en ville un lieu où se dressaient les édifices du gouvernement. La place, nommée Eleuthéra, située autour de ces édifices, était l’espace où se situait cette sorte d’école modèle de la vie. Elle était divisée en quatre classes pour les quatre âges différents de la vie humaine : les enfants, les adolescents, les hommes matures et les vieillards.
Chacune de ces quatre classes avait plusieurs chefs, correspondants aux différentes tribus de la Perse. Pour les enfants, on choisissait parmi les vieillards ceux qui paraissaient pouvoir les rendre meilleurs. Dans le même but, pour les adolescents, on choisissait les chefs parmi les hommes matures. On choisissait, pour les hommes matures, des chefs dans leur propre section qui pourraient garantir le respect des règles et des ordres de l’autorité suprême. Les vieillards avaient aussi leurs chefs venant de leur propre section, afin de veiller au bon accomplissement de leurs devoirs.
Chaque âge avait ses prescriptions particulières, dont le but était de former des citoyens vertueux
Les enfants venaient à l’école de justice apprendre les lettres. Ils apprenaient également à tirer à l’arc et à lancer le javelot. Cependant, leurs gouverneurs passaient une partie de leur temps à faire la justice, car il y avait entre les enfants, autant qu’entre les hommes, des conflits à régler et des accusations de vol, de violence, d’injures, etc. Si quelqu’un était reconnu coupable, on lui infligeait une peine. Ceux qui portaient de fausses accusations étaient aussi punis.
Il y avait un délit qui était jugé sévèrement en Perse, contrairement aux autres peuples qui n’en relevaient pas l’importance, c’était l’ingratitude, source de beaucoup de haine entre les hommes. Si un enfant n’était pas reconnaissant quand il aurait dû l’être, on le punissait. Les magistrats perses affirmaient que les ingrats se souciaient peu des dieux, de leur famille, de leurs amis ou de leur patrie. En outre, ils disaient que l’ingratitude avait pour compagne l’impudence.
Les enfants apprenaient aussi la tempérance, vertu morale modérant les passions et les désirs, en voyant chaque jour leurs aînés eux-mêmes se comporter avec tempérance. Ils apprenaient l’obéissance aux chefs en voyant les plus âgés observer la même obéissance. Et ils apprenaient à bien se maîtriser vis-à-vis de la nourriture et de la boisson, car ils voyaient les plus âgés prendre leur repas seulement quand leur gouverneur leur en accordait la permission.
Les enfants apportaient de leur maison, comme nourriture principale, du pain, et un assaisonnement de légumes. Ils apportaient aussi une tasse pour boire en puisant l’eau dans la rivière.
C’était ainsi que les enfants, dans cette école, cultivaient l’esprit et le corps jusqu’à l’âge de seize ou dix-sept ans. Ensuite, ils entraient dans la classe des adolescents
La chasse était pour les adolescents une école de la guerre
Au sortir de l’enfance, les adolescents couchaient chaque nuit autour des édifices, avec leurs armes d’entraînement, sauf ceux qui étaient mariés et pouvaient s’en dispenser de temps à autre. Ils veillaient ainsi à la sûreté de la ville et cultivaient la tempérance.
Pendant le jour, ils se mettaient à disposition de leurs gouverneurs pour contribuer au service public. Certains restaient de garde près des édifices du gouvernement. Quand le roi allait à la chasse, plusieurs fois par mois, il emmenait la moitié de cette garde. Ceux qu’il emmenait devaient avoir un sabre ou un sagaris (sorte de hache), un bouclier d’osier et deux javelots.
La chasse était en Perse un exercice public et le roi se mettait à la tête des chasseurs, chassant lui-même et veillant à ce que chacun fit son devoir. Car le roi pensait que la chasse était la véritable école de la guerre. Il fallait se lever tôt, supporter le froid et le chaud, marcher ou courir, être prêt, sans répit, à tirer à l’arc ou à lancer le javelot.
Le chasseur devait affronter des bêtes vigoureuses et les frapper ou s’en garantir quand elles fonçaient sur lui. Toutes situations qui se retrouvaient dans la guerre.
Les jeunes chasseurs prenaient avec eux du pain et du cresson pour le repas. Tant que la chasse durait, ils ne mangeaient pas. Ce qui les aguerrissait également. Ils n’avaient pas moins d’appétit à ne manger que cette nourriture. Car quel délice, quand on a faim, de manger une tranche de pain bis ! Et quel délice, quand on a soif, de boire de l’eau pure !
Les jeunes gens, séjournant dans la ville, s’entraînaient aux mêmes exercices que dans leur enfance : tir à l’arc, lancer de javelot. Il y avait entre eux des compétitions et des concours publics avec des prix. On faisait l’éloge de la tribu qui avait le plus grand nombre d’adolescents recommandables pour leur science, leur courage et leur obéissance. En outre, on faisait honneur à tous ceux qui avaient participé à leur éducation et à leur formation.
Tous développaient la vertu, l’habileté, le courage et l’obéissance
Les adolescents pouvaient aussi être employés par les magistrats pour aider à la justice dans des affaires exigeant de la vigueur ou de la rapidité, telles que la résolution de conflits ou la recherche de malfaiteurs.
C’était la manière d’éduquer les adolescents dont bénéficia aussi Cyrus. Après dix ans de cette éducation, les jeunes gens entraient dans la classe des hommes matures, pour les vingt-cinq années suivantes.
Les hommes matures se mettaient aussi à disposition des magistrats pour diverses tâches. Ces hommes étaient assez expérimentés pour porter conseil et ils étaient vigoureux dans l’action. S’ils devaient partir à la guerre, ils s’armaient pour combattre de près, un bouclier au bras gauche et à la main droite, un coutelas ou un sabre.
Lorsqu’ils avaient dépassé cinquante ans, ils entraient alors dans la classe des vieillards. Ceux-ci n’allaient plus à la guerre hors de leur patrie. Ils jugeaient les affaires publiques et privées. Ils prononçaient les condamnations et les peines à l’issue des jugements. Ils avaient également la charge de choisir les autorités gouvernementales et les responsables de l’administration.
Les écoles de justice étaient ouvertes à tous les enfants de Perse
C’était une école ouverte et complétement intégrée à la vie quotidienne du peuple perse. Et en même temps, c’était une école modèle pour tous les Perses.
Tous les parents Perses pouvaient envoyer leurs enfants aux écoles communes de justice. Néanmoins, seuls ceux qui avaient de bonnes conditions de vie et pouvaient laisser leurs enfants sans travailler pouvaient réellement le faire. Cela entraînait par conséquent une sélection pour entrer dans ces écoles. Ainsi, les élèves ayant pu faire tout le cursus de cette école de justice devenaient des vieillards ayant passé par tous les degrés de la connaissance et de la pratique du bien.
Cyrus le Grand suivit ce parcours d’éducation et d’apprentissage, avec un intermède de plusieurs années dans l’enfance où il partit avec sa mère Mandane chez Astyage, le roi des Mèdes, son grand-père. Il apprit beaucoup là aussi, dans une relation aimante et bienveillante avec Astyage. Quand il revint en Perse, il continua son éducation dans la classe des enfants pendant un an, où il surprit ses compagnons par sa générosité et par ses aptitudes remarquables dans les exercices.
Puis Cyrus entra dans la classe des adolescents, et il fut encore à un niveau supérieur parmi ses compagnons, dans les exercices, mais aussi dans son comportement : sa patience, son respect des vieillards, son obéissance aux chefs.
Telle était l’organisation de l’éducation et de la formation à un haut niveau, par laquelle les Perses pensaient parvenir à rendre meilleurs ceux qui seraient amenés à diriger ou à être chargés de responsabilités. Cela n’inciterait-il pas également toute la société des Perses à devenir meilleure ?
Article inspiré du livre Cyropédie de Xénophon, historien et philosophe grec (430–355 av. J.-C.)
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