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Opinion. Les conflits armés contre Taïwan ou comment le Parti communiste chinois utilise l’invasion de Taïwan par la force

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La récente attitude des autorités communistes chinoises, lors de la visite de Nancy Pelosi à Taïwan, remet en mémoire un certain livre qui prédisait l’invasion de Taïwan par la force. Publié en 1994, August 1995 : The Great Prophecy of the Century of the Chinese Communist Invasion of Taiwan by Force, (Août 1995 : La grande prophétie du siècle, l’attaque de Taïwan par les communistes chinois), a été décrit par certains comme un livre étrange. Mais d’autres ont estimé que l’auteur, Cheng Lan-ping ne faisait que vendre de la panique et n’était qu’un outil utilisé par le Parti communiste chinois.

Peut-être est-ce le moment de prendre le temps et de revenir sur la manière dont le Parti communiste chinois (PCC) a continuellement utilisé l’invasion de Taïwan par la force

Quand l’invasion de Taïwan par la force devient ou outil de la propagande du PCC

En juillet 1995, lors de la visite du président de Taïwan, Lee Teng-hui (1923 – 2020), aux États-Unis, le PCC avait annoncé le début des exercices militaires dans le détroit de Taïwan. Ces exercices ont été maintenus jusqu’au 25 mars 1996, deux jours après l’élection présidentielle à Taïwan.

Pendant l’élection présidentielle de mars 1996 à Taïwan, des unités d’artillerie de l’Armée populaire de libération (APL) à Fujian ont lancé des missiles depuis les îles périphériques de Taiwan. L’armée américaine avait également envoyé deux groupes de combat de porte-avions, l’USS Independence et l’USS Nimitz, dans le détroit de Taïwan, ce qui avait constitué le plus grand déploiement de forces américaines en Extrême-Orient depuis la guerre du Vietnam.

Xi Jinping était alors secrétaire adjoint du comité du parti de la province de Fujian.

Trois mois avant l’exercice militaire, le major général Liu Liankun, du département de la logistique de l’APL, avait fourni aux militaires taïwanais une copie secrète du United 9-6-1, indiquant que si un « scénario catastrophe » devait se produire lors de l’élection présidentielle à Taïwan, l’exercice militaire se transformerait en une véritable opération militaire.

Les conflits armés contre Taïwan ou comment le Parti communiste chinois utilise l’invasion de Taïwan par la force
En mars 1996, Li Teng-hui a été élu, et le PCC, après avoir utilisé la propagande autour de l’invasion de Taïwan par la force, a fait comme si rien ne s’était passé. (Image : National Assembly / wikimedia Commons)

Le PCC aurait-il pu attaquer Taïwan ?

Mais un quart de siècle plus tard, en y regardant de plus près, le PCC aurait-il été capable d’attaquer Taïwan à cette époque ? Même s’il avait atteint les îles extérieures, aurait-il été capable d’attaquer Taïwan de toutes ses forces par la suite ? Plus important encore, il restait encore un an environ avant la récupération de Hong Kong, et les horloges du compte à rebours du retour de Hong Kong avaient déjà été placées dans toutes les grandes villes de Chine. Une attaque contre Taïwan à cette époque aurait sans aucun doute été une déclaration au monde qu’il n’existerait pas de politique de « un pays, deux systèmes ».

Par ailleurs, après l’effondrement de l’Union soviétique, il y a eu très peu de résistance politique intérieure en Europe et aux États-Unis à l’envoi de troupes pour le maintien de la paix. Au début de la période de l’après-guerre froide, l’armée américaine n’était pratiquement pas menacée et, à part l’envoi de deux groupes de combat de porte-avions, il y avait en fait beaucoup de puissance militaire à mobiliser.

En fin de compte, Li Teng-hui a été élu, et le PCC a fait comme si rien ne s’était passé.

Utilisation de la guerre psychologique

Il est évident que le PCC tentait délibérément de bluffer à cette époque, et la fuite d’informations par le major général Liu Liankun du département logistique de l’APL faisait en fait partie de la guerre psychologique. Il est même possible que le livre August 1995 : The Great Prophecy of the Century of the Chinese Communist Invasion of Taiwan by Force ait été écrit pour créer une atmosphère tendue. Une chose est sûre, l’auteur, Cheng Lan-ping, est un nationaliste de la Grande Chine qui prône la réunification du détroit.

L’évolution de Taïwan vers une démocratie complète dans les années 1990 semble avoir été une occasion unique. S’il n’y avait pas eu de réforme démocratique à l’époque, il n’y aurait peut-être pas eu de deuxième chance non plus.

À cette époque, le PCC n’était pas encore totalement sorti de la morosité due à l’effondrement de l’Union soviétique, la vague de démocratie libérale en Europe et aux États-Unis était écrasante, et même l’Organisation mondiale du commerce nouvellement créée pouvait exclure la Chine. À l’époque, le PCC était dans une position d’évitement extrême. Ainsi, lorsque Newton Leroy McPherson, plus connu sous le nom de Newt Gingrich, qui était également président de la Chambre des représentants des États-Unis, s’est rendu à Taïwan en 1997, Pékin a traité la visite comme si de rien n’était.

Dans les années 1980, le PCC pouvait encore justifier son régime totalitaire en affirmant que « la nourriture et les vêtements sont les plus grands droits de l’homme ». Pour autant, la croissance économique ne peut pas toujours être soutenue par la seule volonté des autorités communistes. Ainsi, au cours de la dernière décennie, la Chine a rencontré les mêmes difficultés que de nombreux pays en développement autoritaires : à savoir que la croissance économique s’est ralentie lorsqu’elle a rencontré un goulet d’étranglement dans le développement. Ce phénomène connu sous le nom de piège des revenus intermédiaires.

Dans le même temps, le PCC a progressivement commencé à promouvoir le nationalisme pour justifier son pouvoir. Gouverner par le nationalisme, est une véritable auto-immolation. Le PCC a pourtant réalisé que le nationalisme est une arme à double tranchant, mais il semble qu’il n’ait pas d’autre choix que de suivre cette voie.

Les conflits armés contre Taïwan ou comment le Parti communiste chinois utilise l’invasion de Taïwan par la force
Lorsque Mme Pelosi s’est rendue à Taïwan, les autorités communistes ont dû faire une déclaration à tous les niveaux hiérarchiques. Par exemple, la forme de la déclaration des responsables du gouvernement de la Région administrative spéciale (RAS) de Hong Kong était particulièrement inhabituelle. (Image : wikimedia / China-Special_Administrative_Regions.png: en:user:Alanmak, User:Serg!o derivative work: Dr Brains / CC BY-SA 3.0)

Dans l’histoire, il y a eu trois vagues de tentative d’invasion Taiwan par la force

La première vague s’est produite en 1954 et 1958. La deuxième vague a été l’intimidation au moyen de missiles en 1994-1995, avant le premier président directement élu de Taïwan, comme mentionné ci-dessus. À proprement parler, la troisième vague a commencé avec l’incursion d’avions militaires de l’APL dans l’espace aérien de Taïwan de fin 2021 à aujourd’hui.

En d’autres termes, la situation dans le détroit de Taïwan était déjà tendue avant la visite de Mme Pelosi à Taïwan, et ce n’est pas en raison de la visite de Nancy Pelosi à Taïwan que le PCC a été touché. Lorsque Mme Pelosi s’est rendue à Taïwan, les autorités communistes ont dû faire une déclaration à tous les niveaux hiérarchiques.

Par exemple, la forme de la déclaration des responsables du gouvernement de la Région administrative spéciale (RAS) de Hong Kong était particulièrement inhabituelle.


Dans le passé, le gouvernement publiait généralement des déclarations sans noms, et une seule annonce suffisait à représenter la position collective. Cette fois, cependant, les fonctionnaires politiquement responsables ont publié des communiqués de presse en leur nom personnel avec le même contenu.

Cela reflète le fait que les responsables politiques de la RAS peuvent être accusés d’hésiter dans leur position, s’ils ne publient pas de déclarations à titre individuel. Il est également évident que la culture du manque de confiance dans une société totalitaire a fini par engloutir la ville.

En raison du manque de confiance dans une société totalitaire, les responsables et les élites doivent souvent faire connaître leurs intentions de la manière la plus flagrante. Par extension, les exercices de l’APL et les paroles extrêmes des responsables diplomatiques partent tous du désir d’éviter d’être étiquetés comme faibles. Même aux plus hauts niveaux de la hiérarchie dirigeante, il y a autant de pression pour adopter une position dure.

En réalité, la seule chose que Pékin puisse faire est de continuer à s’accrocher à l’espoir d’une réunification éventuelle et de perpétuer cette illusion indéfiniment. C’est peut-être ce que l’on appelle la pensée de fond, car le PCC n’a pas d’autres valeurs dont il peut se vanter que le nationalisme.

Rédacteur Jean-Baptiste Adrien-Clotaire

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