Le thorium pourrait être la solution miracle pour résoudre notre crise énergétique. La seule source d’énergie capable de répondre à la demande mondiale tout en évitant les émissions de gaz à effet de serre est l’énergie nucléaire. Mais notre perception de l’énergie nucléaire est influencée par les questions de sécurité, les déchets radiotoxiques et la menace de prolifération nucléaire.
Il existe pourtant une alternative plus sûre à la technologie nucléaire actuelle : de nouveaux réacteurs, intrinsèquement plus sûrs que les réacteurs conventionnels, produisent peu de déchets et sont résistants à la prolifération. Ces nouveaux modèles nous permettent de réutiliser nos déchets radiotoxiques comme combustible.
Le thorium : un combustible nucléaire potentiel
Le secret réside dans un élément brillant et argenté appelé thorium, et ce n’est pas nouveau. Le thorium est depuis longtemps considéré comme un combustible nucléaire potentiel. Des prototypes non conventionnels, comme le réacteur à sels fondus au thorium d’Oak Ridge (MSR) aux États-Unis, ont été présentés dans les années 1960. Depuis, les États-Unis, l’Allemagne et la Grande-Bretagne ont tous utilisé le thorium comme combustible pour produire de l’électricité dans des réacteurs conventionnels. La technologie a fait ses preuves.
Le thorium est quatre fois plus abondant que l’uranium et presque aussi répandu que le plomb. À peine 5 000 tonnes de thorium pourraient répondre aux besoins énergétiques de la planète entière pendant un an. Les gisements connus à eux seuls fourniraient suffisamment d’énergie pour 10 000 ans. Contrairement au combustible à l’uranium classique, le thorium est brûlé, ce qui produit beaucoup moins de déchets radiotoxiques et presque pas de plutonium. On prétend souvent que l’incapacité du thorium à produire du plutonium pour les armes est la raison de son abandon pendant la Guerre froide.
Le thorium bénéficie d’un soutien considérable comme combustible nucléaire. Avec des additifs d’uranium ou de plutonium, il pourrait être utilisé dans les réacteurs nucléaires actuels avec seulement des modifications mineures. Il offre également la possibilité d’exploiter les dernières innovations en matière de conception de réacteurs. Un réacteur à sels fondus, par exemple, est résistant à la fusion, car le combustible à base de fluorure est déjà fondu. Théoriquement autorégulateur, ce modèle pourrait convenir à de petites unités modulaires destinées aux communautés isolées, produisant de l’électricité ou de la chaleur.
Une autre approche est le réacteur sous-critique piloté par accélérateur (ADSR). Dans ce modèle encore théorique, des protons de haute énergie sont tirés sur des atomes de métaux lourds comme le plomb, arrachant des neutrons individuels. Le combustible au thorium absorbe ces neutrons libres de haute énergie et est converti en uranium. Cet uranium absorbe à son tour davantage de neutrons et se divise (« fission »), libérant ainsi de l’énergie.
L’ADSR est extrêmement sûr car le procédé thorium-uranium est « sous-critique ». Autrement dit, si l’accélérateur est arrêté, le réacteur est à sécurité intégrée et incapable d’entretenir une réaction en chaîne. De plus, les neutrons à haute énergie qu’il génère peuvent décomposer les déchets radioactifs toxiques des réacteurs conventionnels, transformant ainsi nos stocks de déchets nucléaires en combustible supplémentaire.
L’Inde, forte de ses importants gisements de thorium, s’intéresse désormais à la technologie nucléaire basée sur le thorium, utilisant un mélange thorium-plutonium. Au Japon, des recherches sont en cours pour ressusciter le concept des sels fondus de thorium. La Norvège étudie le potentiel de ses importantes réserves de thorium pour fournir de l’énergie pendant les années qui suivront l’exploitation du gaz et du pétrole de la mer du Nord. La Chine, qui produit de grandes quantités de thorium, sous-produit toxique de l’exploitation des terres rares, investit massivement dans les réacteurs à sels fondus et les réacteurs ADSR.
Alors, au Royaume-Uni ? Malheureusement, il n’existe pas de position cohérente du gouvernement, de l’industrie ou du milieu universitaire. Pourtant, le Royaume-Uni possède une riche expertise en ingénierie et en matériaux, ainsi qu’en conception de réacteurs et d’accélérateurs.
Même un investissement modeste dans un programme avancé de recherche et développement sur le thorium pourrait offrir au Royaume-Uni une occasion unique de bâtir et de pérenniser une industrie nucléaire de plusieurs milliards de livres sterling, fondée sur une production d’énergie nucléaire sûre, inépuisable, produisant peu de déchets et résistante à la prolifération. Outre la sécurité énergétique nationale, cela donnerait au Royaume-Uni les moyens d’être compétitif sur les marchés nucléaires existants et d’ouvrir de nouveaux marchés internationaux fermés aux réacteurs à uranium et au plutonium.
Universitaires, entrepreneurs et réformateurs sociaux œuvrent tous ensemble à un consensus sur un avenir nucléaire alimenté au thorium. Mais sans soutien ni leadership du gouvernement, et avec une industrie nucléaire attachée aux conceptions existantes à base d’uranium, le Royaume-Uni risque de manquer une nouvelle occasion en or, ou plutôt en argent, dans ce cas précis.
Rédacteur Fetty Adler
Collaborateur Jo Ann
Auteur
Robert Cywinski Professeur, conseiller de recherche spécial, Université de Huddersfield.
Cet article est republié à partir du site The Conversation, sous licence Creative Commons
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