Il est parfois difficile de déterminer ce qui est bien ou mal dans le monde humain. Mais la cause et l’effet ne sont jamais faux. Là où il y a une cause, il y a un effet. Le monde observe actuellement la guerre entre l’Ukraine et la Russie. Il y a beaucoup d’effervescence autour de cet évènement. Quelle a été l’histoire de la querelle entre l’Ukraine et la Russie ? Cet article tente de démêler le schéma historique de ce qui s’est passé entre l’Ukraine et la Russie, à l’aide de faits historiques.
L’ancienne Union soviétique a toujours interdit de parler de l’Holodomor en Ukraine
L’Holodomor est une famine qui a eu lieu dans la République soviétique d’Ukraine, en Union soviétique, entre 1932 et 1933. La plupart des spécialistes contemporains s’accordent à dire que l’Holodomor est une catastrophe qui s’est produite dans le cadre de la campagne de collectivisation agricole de Staline. De fait, les causes de la famine étaient surtout d’origine humaine.
En juin 1933, au plus fort de l’Holodomor, près de 28 000 garçons et filles mouraient de faim chaque jour en Ukraine. Cette terre riche, connue comme étant le « grenier de l’Europe », a été ravagée par une famine d’une ampleur sans précédent. Cette famine a été causée à 100 % par l’homme. Afin de la faire passer en force, le dirigeant soviétique de l'époque, Staline, était déterminé à donner aux paysans ukrainiens récalcitrants une « leçon qu'ils n'oublieront pas », car ils résistaient à la collectivisation. La collectivisation en Union soviétique signifiait que les paysans devaient abandonner leurs terres. Ils devaient aller travailler dans des fermes contrôlées par le gouvernement.
Une famine niée par l’ex-Union soviétique
Alors que des millions de personnes sont mortes en Ukraine et dans le Caucase du Nord, l’Union soviétique a nié l’existence de la famine. Elle a exporté de la nourriture d’Ukraine pour nourrir toute sa population. Pendant plus de 50 ans, avant que l’Union soviétique ne soit au bord de l’effondrement, il était interdit d’en parler. Comment les autorités communistes soviétiques ont-elles caché la vérité et maintenu le monde extérieur dans l’ignorance de ce qui se passait en Ukraine lorsque l’Holodomor faisait rage ?
Ce n’est qu’au milieu des années 1940 qu’en Amérique du Nord, certains expatriés ukrainiens ont soulevé pour la première fois la question de la famine qui s’était produite en Ukraine au début des années 1930. Ils ont alerté le monde sur ce que les Soviétiques faisaient en Ukraine. Tout d’abord, l’Union soviétique a supprimé avec force toute mention de l’Holodomor dans son pays. Pendant cet épisode de l’histoire, mentionner l’Holodomor en Ukraine était un crime passible d’une peine de cinq ans et de l’envoi au Goulag. Les citoyens soviétiques qui accusaient les autorités soviétiques d’être responsables de l’Holodomor étaient, de plus, passibles de la peine de mort.
Des données démographiques modifiées par les autorités soviétiques
Lorsque les chiffres du recensement soviétique de 1937 ont été nettement inférieurs aux prévisions, les données du recensement ont été cryptées. Les responsables du recensement ont été supprimés. L’Union soviétique a également essayé de modifier et de déformer les données démographiques, afin de dissimuler la disparition de la population. Ainsi, le nouveau recensement de 1939 a été organisé de manière à gonfler les chiffres pour qu’ils correspondent à ceux indiqués par Staline, dans son rapport au 18ème congrès du Parti communiste de l’Union soviétique.
À partir de ce moment-là, l’Union soviétique n’a plus procédé au recensement. Ce n’est qu’en 1959, qu’elle a recommencé à l’organiser. Lorsqu’il est finalement devenu trop tard pour dissimuler l’affaire, l’Union soviétique a de nouveau adopté une attitude de minimisation. Les autorités soviétiques ont minoré la gravité de la famine en Ukraine en la qualifiant de « difficultés alimentaires ». Le fait de mêler quelques faits à leur geste général de déni renforçait la tromperie et rendait plus difficile la compréhension de ce qui se passait réellement. Ils ont même concocté la première théorie du complot, selon laquelle des espions polonais sabotaient l’Ukraine et provoquaient des pénuries alimentaires.
Le ministre soviétique des affaires étrangères de l’époque, Litvinov, a réprimandé un journaliste d’investigation gallois, en ces termes : « Vous devez considérer le problème dans une perspective plus large. La faim actuelle est temporaire. Lorsque vous écrivez un livre, vous devez avoir une vision à plus long terme. On peut difficilement parler de famine ». Les médias soviétiques officiels s’en prenaient à tout journaliste ou dignitaire étranger qui s’exprimait sur le sujet. Un grand nombre de journalistes occidentaux de gauche était soudoyé, pour noyer les voix critiques dans une mer d’éloges.
Une censure et une propagande : les gènes idéologiques du Parti communiste
La dissimulation soviétique s’est poursuivie dans les années 1980. Par exemple, en avril 1983, l’ambassade soviétique, au Canada, a publié une déclaration condamnant les déclarations publiques faites à l’occasion du 50ème anniversaire de l’Holodomor, en Amérique du Nord. Elle a précisé que c’étaient des « calomnies contre l’Union soviétique ».
Les autorités soviétiques ont également construit des villages « modèles » pour divertir les étrangers qui venaient enquêter en Union soviétique et les convaincre que tout allait bien. Dans ces « villages modèles », les autorités étaient spécialement coordonnées pour faire venir des biens et de la nourriture afin de donner au village une apparence de prospérité. Les villageois pauvres et aux allures négligées ont été chassés et remplacés par des cadres ou des artistes d’art populaire, bien nourris et loyaux.
Une fois les enquêteurs partis, tous ces biens et la nourriture apportée ont été emportés. Certains écrivains occidentaux, de gauche pro-soviétiques, ont accepté cet échantillon de propagande et ont rapporté cette fausse réalité au monde. En 1933, les autorités soviétiques conseillaient vivement aux journalistes étrangers de rester à Moscou et leur interdisaient officiellement d’entrer en Ukraine et dans le Caucase du Nord.
Toutefois, même avant cette interdiction, les journalistes occidentaux ne pouvaient voyager hors de Moscou qu’accompagnés d’officiels soviétiques. Le gouvernement soviétique pouvait révoquer les visas des journalistes s’il estimait que leur travail était préjudiciable aux autorités. Si leurs reportages avaient un impact positif sur l’Union soviétique, les journalistes pouvaient se voir accorder des privilèges supplémentaires, tels qu’un lieu de résidence luxueux ou un accès prioritaire à certains personnages clés. De même, les hommes d’affaires ou les techniciens occidentaux, engagés dans des pratiques commerciales en Union soviétique, pouvaient perdre leurs contrats commerciaux avec l’État soviétique et subir des pertes financières, s’ils maintenaient une attitude critique.
En lisant cela, on se demande pourquoi ces méthodes de manipulation des autorités soviétiques sont si semblables à celles du Parti communiste chinois aujourd’hui. La raison est en fait très simple, parce que les gènes idéologiques du Parti communiste sont exactement les mêmes.
La vérité sur l’Holodomor a été présentée publiquement après l’effondrement de l’Union soviétique
Soixante-dix ans plus tard, au début de 2002, le gouvernement ukrainien a déclassifié plus de 1 000 documents secrets sur la famine. Le président ukrainien, Leonid Kuchma, a signé un décret désignant le 22 novembre comme « Journée de commémoration de la famine ». Dans un discours public, l’ancien président Iouchtchenko a déclaré que 15 millions de personnes étaient mortes de la famine et que l’Ukraine avait perdu un quart de sa population pendant cette famine.
Le 25 novembre 2006, les drapeaux des villes ukrainiennes ont été mis en berne et des rubans noirs ont été enroulés autour du drapeau national pour rendre hommage aux victimes de l’Holodomor. L’histoire de l’alliance russe est officiellement terminée. Aujourd’hui, l’Ukraine et la Russie ont une querelle profonde, aussi insondable que l’eau profonde. Il semble difficile de combler le fossé.
Le président ukrainien, M. Iouchtchenko, et le président du Parlement, M. Moroz, avaient présidé la cérémonie de pose de la première pierre du mémorial de l’Holodomor, ouvert en 2008. Ils avaient aussi organisé un service de deuil à la bougie sur la place du centre-ville. Les stations de télévision et de radio de toute l’Ukraine avaient alors cessé de diffuser des programmes de divertissement.
L’Ukraine et la Russie : se souvenir de la vérité devient important
Il y aura toujours des endroits dans ce monde où certains faits sont sélectivement oubliés, il est donc bien plus important de se souvenir de la vérité que de se quereller à son sujet !
Après le déclenchement de la famine, les Soviétiques auraient pu empêcher la situation de prendre une tournure incontrôlable. Mais au lieu de cela, ils ont pris une série de mesures qui ont conduit à l’aggravation de l’Holodomor en Ukraine, ce qui a conduit de nombreuses personnes à se demander si les autorités soviétiques de l’époque ne l’avaient pas fait délibérément.
Quoi qu’il en soit, ce qui est clair, c’est que la catastrophe a provoqué un énorme fossé dans les relations ethniques au sein de l’Union soviétique. Elle a également conduit directement à l’impossibilité de réunifier les deux peuples de l’Ukraine et de la Russie : rendant complètement vain un siècle d’efforts de la dynastie Romanov pour réunir les deux communautés. Même après la Seconde Guerre mondiale et aujourd’hui encore, l’Ukraine en veut à la Russie pour cette question et ne reculera devant rien pour la combattre et l’affronter.
Rédacteur Jean-Baptiste Adrien-Clotaire
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