L’altercation survenue en pleine cérémonie de la remise des Oscars entre l’acteur américain Will Smith et l’humoriste Chris Rock n’a pas fini de susciter des réactions. Prenant les devants avant la décision finale de l’Académie, celui qui débuta une carrière fulgurante en 1990 avec la série Le Prince de Bel-Air avait démissionné de la prestigieuse institution. Sur le plan humain les faits posent question.
Retour sur une gifle très médiatisée
Le 27 mars dernier, à la stupéfaction générale, l’acteur Will Smith, nommé pour recevoir l’Oscar du meilleur acteur, se lève pour asséner froidement une gifle magistrale à l’humoriste animant la cérémonie des Oscars, Chris Rock. Celui-ci venait de lancer une plaisanterie à propos du crâne rasé de Jada Pinkett Smith, l’épouse de Will Smith. Celle-ci est atteinte d’alopécie, une maladie entraînant la perte des cheveux. La scène relayée à maintes reprises sur les réseaux sociaux a fait le tour du monde. Selon certains, l’acteur aurait dû être exclu sans ménagement de la salle de réception après l’esclandre. D’autres estiment qu’il n’aurait pas dû recevoir la récompense prévue. Quelques minutes après avoir administré la gifle, Will Smith obtenait en effet l’Oscar du meilleur acteur pour son rôle dans le film La Méthode Williams. « L’amour vous fait faire des choses folles », a-t-il dit après avoir reçu son prix. L’Académie a condamné son geste et entamé des poursuites judiciaires à l’encontre de l’acteur qui, par son comportement, aurait violé les « normes éthiques » de l’Académie et nui à son image.
Quelques jours plus tard, Will Smith a présenté sa démission à l’Académie.
Que révèle une telle démission sur le plan humain ?
« Je démissionne de mon poste de membre de l’Académie des arts et sciences du cinéma et j’accepterai toutes les conséquences que le conseil d’administration estimera appropriées. » Il a poursuivi dans son communiqué : « Mes actions lors de la 94ème cérémonie des Oscars ont été choquantes, douloureuses et inexcusables. La liste de ceux que j’ai blessés est longue ».
L’acteur est conscient d’avoir infligé à l’animateur une blessure surtout morale. Elodie Laye Mielczareck, une sémiologue spécialisée dans le langage non verbal, rappelle que le soufflet entraînait jusqu’au XIXe siècle des duels, car il touchait davantage l’ego de la victime que son intégrité physique.
Samuel Dock, docteur en psychopathologie, psychologue clinicien et auteur de Les Chemins de la thérapie, édité en février 2022, pense que Will Smith s’est senti atteint en tant que mari et père. Il n’a pu supporter la plaisanterie visant son épouse. « Le changement prend du temps et je suis engagé à faire le travail pour que je ne permette plus jamais à la violence de prendre le pas sur la raison. » a écrit l’acteur dans sa lettre de démission. Son épouse a levé les yeux au ciel, se contentant de répondre par l’indifférence. En revanche Will Smith a réagi par la violence. L’acteur se rend compte du chemin qu’il lui reste à parcourir pour surmonter ses pulsions.
Comment éviter d’en arriver là ?
Chaque individu se trouve confronté à la gestion de ses émotions au cours de son existence. Rester inébranlable face aux difficultés, aux railleries, n’est pas chose facile. Ce n’est pas une faculté innée. Acquérir la sérénité s’obtient par un long processus qui « prend du temps ». Il s’agit de demeurer « stoïque » en toutes circonstances, de pratiquer donc une forme de stoïcisme. Comment définir le stoïcisme ? Le stoïcisme, une école philosophique de la tradition grecque fondée au IIIe siècle av. J.-C. par Zénon de Kirion, repose sur deux valeurs centrales : la vertu et la tranquillité. Pour les stoïciens, le plus important est de faire en permanence un travail sur soi en examinant sa conscience. Vivre de façon vertueuse, c’est surtout s’affranchir des passions et émotions négatives. L’empereur romain Marc Aurèle qui fut un stoïcien éminent disait : « Comprends que tu as en toi quelque chose de plus puissant et divin que ce qui cause tes passions et te manipule comme une vulgaire marionnette. »
Un examen de conscience régulier évite de rejeter son malheur sur autrui et favorise ainsi la tranquillité de l’esprit. Selon Épictète, philosophe de l’école stoïcienne « Accuser les autres de son malheur est le fait d’un ignorant. » Les valeurs stoïciennes ont évolué à travers les siècles. Elles connaissent un regain d’intérêt en ces temps de crises diverses. Elles enseignent à se détacher des circonstances extérieures pour éviter les débordements lourds de conséquences.
La nouvelle est tombée : l’acteur Will Smith est banni pour une durée de dix ans de tout évènement organisé par l’Académie « qu’il s’agisse ou non des Oscars ». La sanction finale envoie un message clair : mesurer ce qu’il en coûte quand les émotions prennent le pas sur la raison.
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