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Société. Le bonheur de vieillir en cultivant sa sagesse et sa relation aux autres

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Nous avons besoin de la sagesse de nos aînés et nous devrions leur laisser une grande place dans notre cœur. Ils ont beaucoup à nous dire sur la vie et les valeurs essentielles. Ils l’expriment avec leurs mots ou par leurs attitudes sincères et paisibles. Le bonheur de vieillir provient de qualités souvent plus développées chez les personnes âgées, telles qu’une bonne connaissance de soi, le lâcher-prise et l’altruisme.

Un respect des aînés différent selon les cultures

Dans notre société moderne, la situation de nos aînés et le respect que nous leur portons semblent s’être détériorés. Nous considérons souvent les personnes âgées comme des personnes à charge de la société. En outre, plusieurs médias ont relaté des faits dégradants sur nos aînés. On y parle de gains financiers considérables dans certains EHPAD, au détriment des pensionnaires retraités et de leur famille, mais aussi de mauvais traitements sur les aînés dans certains de ces établissements.

Toutes les maisons de retraite ne fonctionnent pas ainsi, heureusement, mais ces informations n’aident pas les personnes âgées à se sentir aimées et respectées dans la société, elles peuvent même se sentir exclues et éprouver de la honte d’avoir perdu, à différents degrés, leur autonomie.

C’est une situation injuste et déshonorante pour ces vieilles personnes qui, majoritairement, ont cotisé pour la retraite pendant toute leur vie professionnelle, mais surtout ont apporté, et certainement apportent encore, leur propre contribution positive à la société humaine, de quelque manière que ce soit, ne serait-ce que par leur présence dans notre monde humain.

La maladie et la souffrance physique sont souvent présentes dans la vie des personnes âgées et cela peut être difficile à supporter pour elles. Nous devons d’autant plus être à leur écoute et faire preuve de compassion à leur égard. D’autre part, beaucoup de personnes âgées maintenant ne vieillissent plus dans leur famille. Soit à cause de traitements médicaux lourds, soit parce qu’elles n’ont pas de membres de leur famille qui soient en capacité ou qui aient la volonté de s’occuper d’elles.

Le bonheur de vieillir en cultivant sa sagesse et sa relation aux autres
Beaucoup de personnes âgées vieillissent maintenant en maison de retraite ou en EHPAD. (Image : Pressmaster / envato)

« Lors d’un voyage sur l’île d’Okinawa, au Japon, j’ai découvert que les très nombreux centenaires étaient considérés comme des trésors et des porte-bonheurs par leur entourage ! Nous avons encore du chemin à faire pour en arriver là », disait à ce propos, Marie de Hennezel, psychologue clinicienne « le point commun de ces centenaires en bonne santé est leur mode d’alimentation et les activités qu’ils continuent d’exercer, la marche, le chant, le jardinage, la gymnastique douce ou énergétique, la marche en forêt… »

Dans certaines régions du monde aux cultures restées plus traditionnelles, les aînés continuent d’être respectés. Albert Jacquard, généticien et philosophe, disait : « À 86 ans, bien sûr, je cours moins vite, je saute moins haut, mais tant que je peux fabriquer en moi des émotions nouvelles, m’enrichir au contact des autres et enrichir les autres, je suis vieux au sens africain du mot : quelqu’un vers qui on va comme vers une source. »  

D’où vient ce bonheur de vieillir ?

Les personnes âgées comprennent aisément que leur perception de l’environnement extérieur est le reflet de leur univers intérieur et change selon leurs pensées et leur disposition d’esprit. Si leur esprit est rempli de bonnes choses, elles auront un regard positif et bienveillant sur les divers événements qui surviennent dans leur vie et elles sauront en tirer le meilleur. Cette bonne disposition d’esprit est générée par leurs relations humaines bienveillantes, les activités qui les enrichissent intérieurement, la lecture et la réflexion, la tranquillité.

« C’est à la personne qui vieillit de changer elle-même son regard sur ce qu’elle vit, et de se percevoir comme un trésor ! Quand j’interviens auprès de personnes autonomes, qui le veulent et font tout pour le rester, celles-ci savent que si elles retrouvent l’estime d’elles-mêmes, elles ont beaucoup plus de chances de rester autonomes. Car la perte de l’estime de soi est corrélée à la perte d’autonomie : on a honte d’être vieux, on baisse les bras, on ne sert à rien… et on chute. C’est la spirale négative ». « Mais si la personne âgée pense : ce que je vis est différent et intéressant, j’ai une richesse à apporter aux autres, alors elle se redresse. Elle est dans une spirale positive. » explique Marie de Hennezel, dans une interview accordée au média Aleteia.

Le bonheur de vieillir en cultivant sa sagesse et sa relation aux autres
Susciter un bon état d’esprit par des relations humaines bienveillantes et des activités qui enrichissent intérieurement. (Image : koldunov / envato)

Lorsqu’arrivées à l’âge de la retraite, les personnes sortent de la vie professionnelle et ont plus de temps pour la réflexion, elles peuvent développer leur intériorité, élargir leur champ de conscience. C’est une curiosité de l’esprit renouvelée qui leur permet de visiter en elles-mêmes des domaines encore inexplorés. « Car au fond […] le désir, au sens large, ne vieillit pas. […] Notre nature humaine, qui est vivante, qui a envie d’aller de l’avant, de découvrir, qui est désirante peut rester désirante jusqu’au bout. » révèle encore Marie de Hennezel dans un débat au sujet de son livre L’aventure de vieillir

Victor Hugo témoignait : « Je ne vieillis pas, au contraire ! Mon corps décline, mais ma pensée croît. »

Il y a chez les personnes âgées une énergie bienveillante qui les pousse à souhaiter le bonheur aux autres bien plus qu’à elles-mêmes. Elles ont dépassé le stade de l’égoïsme et ne souhaitent rien de particulier pour elles-mêmes, sinon de subvenir à leurs besoins essentiels. Ainsi, elles retrouvent un cœur d’enfant ouvert à toute chose, et de plus, rempli de toute l’expérience de leur vie.

« Dans des groupes de paroles que j’anime, je demande aux gens leur âge chronologique et ensuite leur âge subjectif : toutes les personnes ont au moins 20 ans de moins. » « Et même dans un groupe, une personne de 92 ans a dit : " moi, Madame, j’ai 15 ans ". » « Alors je me suis dit bon, elle exagère celle-là, eh bien, après huit séances, je peux vous dire qu’elle avait bien 15 ans. C’est-à-dire qu’elle avait un esprit, une fraîcheur, une envie de découvrir… cette femme de 92 ans… m’a beaucoup étonnée et en même temps appris. » confie Marie de Hennezel.

Elle leur apprend aussi à composer des petits poèmes japonais très brefs, les haïkus, qui permettent de traduire en trois lignes une émotion, une sensation de la journée, quelque-chose qu’on a trouvé beau. Si des personnes âgées dépriment un peu, c’est une manière d’orienter leur esprit vers l’observation de choses qui font du bien. « C’est une pratique de l’instant présent. Eh bien, je vais vous dire, beaucoup ont adopté cette pratique et font un haïku par jour, en plus, ça se partage avec les autres, on peut s’envoyer des haïkus par mail ou par sms. C’est une façon de partager une émotion avec d’autres. »

Le bonheur de vieillir en cultivant sa sagesse et sa relation aux autres
Pour les grands-parents, quel bonheur de vieillir avec une complicité et un amour profond pour leurs petits-enfants. (Image : monkeybusiness / envato)

Marie de Hennezel cite dans son livre L’aventure de vieillir plusieurs haïkus composés par des aînés, dont celui-là :

Sans savoir pourquoi
J’aime ce monde
Où nous venons pour mourir

Les personnes âgées ont appris à se contenter de peu pour être heureuses. Elles apprécient la moindre chose qui va dans le sens du vrai et du bien et en ressentent de la gratitude. Elles vivent plus dans l’instant présent, ce qui est le meilleur remède aux ruminations sur le passé et aux inquiétudes pour l’avenir.

« Celui dont l’âme est heureuse, ne ressent pas le poids des ans. » disait Platon.

Les aînés semblent privilégier la qualité de leurs relations. Ayant beaucoup moins de charge de travail dans leur vie, elles peuvent investir, de façon désintéressée, du temps et de l’énergie dans leurs amitiés et leurs relations familiales. Pour beaucoup, quel bonheur de vieillir avec dans le cœur une complicité et un amour profond pour leurs petits-enfants. Dans les relations amicales et sincères, il y a aussi une grande part d’aide et d’enrichissement mutuel. En retour, ces moments altruistes apportent beaucoup de joie et de sérénité.

Une perspective plus profonde sur la vie et sur l’essentiel

Il y a deux périodes de la vie où nous nous posons les questions fondamentales de l’existence avec plus d’inquiétude ou d’intensité : l’adolescence et la vieillesse. À l’adolescence, l’approche du monde adulte, tourné vers l’action et la responsabilité, peut faire naître en nous les questions existentielles sur le sens de la vie, sur nos propres conditions humaines et nos propres choix. Devenus vieux, c’est la relative proximité de notre disparition de ce monde qui nous amène à réfléchir sur les différents rôles que nous avons pu jouer durant notre vie, et à chercher une connexion vers quelque chose de plus élevé.

Saint Paul affirmait : « Tandis que notre homme extérieur s’en va en ruine, notre homme intérieur se renouvelle de jours en jours. »

« L’homme intérieur, c’est un concept très vaste et tout le monde ne met pas la même chose derrière ce mot. C’est pourquoi je dis qu’il faut voyager vers son intériorité, se dire mais qui suis-je, quel est mon mandat céleste, quelle est ma tâche sur terre, pourquoi je suis là, qu’est-ce qui importe, qu’est-ce qui est essentiel ? C’est vraiment une réponse intime que chacun doit fournir à cette question, j’ai l’impression que ce n’est pas une descente, c’est une envolée ! » précise Marie de Hennezel.

En assumant certaines responsabilités qu’ils choisissent et qui les motivent, que ce soit au sein de la famille ou de diverses associations, les aînés favorisent le sentiment d’être encore utiles à leurs proches ou à la société. Les vieux ont l’atout d’être riches de toutes leurs expériences passées, ce qui leur permet d’être à la hauteur et de rester sereins, même dans des situations difficiles.

Le bonheur de vieillir en cultivant sa sagesse et sa relation aux autres
En assumant certaines responsabilités qu’ils choisissent et qui les motivent, les aînés favorisent le sentiment d’être encore utiles à leur proches ou à la société. (Image : Pressmaster / envato)

Le metteur en scène Ingmar Bergman exprimait ainsi sa vision de la vieillesse : « Vieillir, c’est comme escalader une grande montagne : en grimpant, les forces diminuent, mais le regard est plus libre, la vue plus large et plus sereine. »

Nos aînés ont une grande capacité d’acceptation et de résilience envers les événements et les aléas de la vie. Ils savent composer avec les circonstances et voir chaque situation de manière positive. La clef de cette capacité est le lâcher-prise vis-à-vis du mental et des émotions. C’est-à-dire accepter que tout ne tourne pas autour de soi et laisser les choses suivre leur cours.

Avec l’âge, nous acquérons généralement une meilleure intelligence émotionnelle. Nous comprenons mieux le processus de nos ressentis et celui des autres. Avec empathie, nous pouvons alors mieux apprécier nos relations sociales, en gardant un état d’esprit serein et bienveillant.

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