Noël apparaît au IVe siècle quand l’Église décrète que la naissance de Jésus-Christ sera célébrée le 25 décembre. Jésus-Christ a prêché l’amour du Dieu et de son prochain. Mais du IXe au XIe siècle, l’empire carolingien s’affaiblissant, une sorte d’anarchie dans laquelle les plus forts terrorisent les plus faibles rend la vie insupportable. Les évêques instaurent la paix de Dieu puis la trêve de Dieu.
La trêve de Noël de 1914
Le 28 juillet 1914, la première guerre mondiale commence. Noël 1914, soit quatre mois plus tard, il y a déjà 300 000 morts et de très nombreux blessés. Les hommes sont choqués, Ils vivent dans des tranchées inondées, il fait très froid, les cadavres jonchent le sol et les blessés peinent à être évacués. Les canons résonnent, c’est l’enfer sur terre.
Le matin du 25 décembre, les armes se taisent. Un chant de Noël, entamé par le ténor Walter Kirchhof s’élève dans le vent glacial. Les autres soldats allemands chantent aussi, puis les Britanniques chantent leur chant de Noël, jusqu’au moment où les Anglais chantent Adeste fideles (un hymne de Noël pour tous les chrétiens) repris par les Allemands. Le chant résonne dans les tranchées ennemies.
Un Allemand sort de sa tranchée avec un sapin dans les mains et un Anglais le rejoint. De part et d’autre des tranchées, les hommes sortent et se souhaitent mutuellement joyeux Noël. Ils échangent des petits cadeaux, font la communion ensemble, enterrent leurs morts. La trêve de Noël dure une semaine et concernent près de 100 000 hommes. Il y aura d’autres trêves mais celle-ci sera immortalisée par le journal anglais Daily Mirror. La censure fera que ni les Français, ni les Allemands en entendront parler.
Les soldats fraternisant ont été dispersés dans d’autres régiments et les années suivantes, les états-majors organisent des attaques afin d’empêcher une nouvelle trêve. La guerre reste la guerre, celle de 14-18 fera près de dix huit millions de morts. Mais cette trêve démontre que les hommes ont pu, malgré les horreurs qu’ils vivaient, garder leur foi et un cœur humain.
L’origine de la trêve de Noël
Dès le IXe siècle et jusqu’au XIe siècle, la France vit de grands troubles. L’empire carolingien s’effondre, l’empire capétien peine à s’imposer. Les seigneurs se font la guerre, cherchant à étendre leur pouvoir et leur domaine. Les paysans, les marchands, le clergé et les femmes en font les frais. Pris en otages, dépossédés de leur bien, exploités, massacrés, les gens vivent dans la terreur.
L’Église cherche à ce que la population mène une vie chrétienne quotidiennement. Dans le même temps, elle cherche à éliminer ces guerres privées entre seigneurs qui ravagent tout sur leur passage et lui causent de grandes pertes. Le clergé se réunit dès le début du Xe siècle en assemblée de la paix dans le centre de la France. En 989, le concile de Charroux décrète la paix de Dieu.
Il s’agit de moraliser la noblesse et de protéger les biens de l’Église et parfois les pauvres qui fournissent les biens nécessaires aux seigneurs et à l’église. La paix de Dieu décrète l’inviolabilité des églises. Toute personne qui ne respecte pas ce décret est frappé d’anathème à moins qu’il ne donne une compensation. Il est interdit de violenter un clerc ou un pauvre car ils ne sont pas armés. Il est également interdit de voler les biens et animaux dans une église.
Cependant, seuls ceux qui jurent devant Dieu, ou plutôt devant des reliques de Saints, de respecter ces interdictions sont redevables. Cela est valable seulement sur une terre qui ne leur appartient pas. L’Église prend ainsi du pouvoir politique. Elle absout les péchés de ceux qui respectent cette paix et excommunie, refuse les derniers sacrements et une sépulture en terre sacrée à ceux qui refusent de s’y plier. Si cela ne fonctionne pas, elle utilise l’armée pour affirmer ses droits. Les nombreux détournements de cette paix de Dieu lui font perdre du crédit.
De la paix de Dieu, à la trêve de Dieu jusqu’à la trêve de Noël
La fin du premier millénaire voit tant de malheurs que les gens se retournent vers le divin et la foi chrétienne retrouve sa vigueur. En 1027, en Catalogne, puis, en 1033, lors du synode de Vic, Oliba, évêque de Vic, lié à Cluny, lance la trêve de Dieu. Aux règles de la paix de Dieu, s’ajoute l’interdiction de commettre des exactions et des combats le dimanche et de détruire les maisons, ce qui assure une meilleure protection des pauvres.
Entre 1037 et 1041, lors du concile d’Arles, puis en 1054, lors du concile de Narbonne, la trêve de Dieu ajoute aux règles précédentes l’interdiction de guerroyer durant les périodes liturgiques, soit du mercredi soir au lundi matin et durant la période de l’Avent, à Noël, durant le Carême, à Pâques, à la Pentecôte et lors des fêtes des grands Saints et de la Sainte Vierge. Il ne reste que quatre-vingts jours dans l’année pour guerroyer.
C’est le début des hospices et des lieux d’hébergement pour les pèlerins ainsi que pour les personnes en errance ou chassées de leur terre. La trêve de Dieu introduit la condamnation de l’homicide entre chrétiens. C’est ce mouvement qui, dans les faits, instaure la paix médiévale. Il sera repris à leur compte par la noblesse et les rois.
La guerre n’est pas pour autant abandonnée, en 1095, lors du concile de Clermont, le pape Urbain II déclare la première croisade, estimant que l’énergie des chevaliers devrait être utilisée pour de nobles causes. La trêve de Dieu est abandonnée au XIIIe siècle car l’ordre féodal est stable et les croisades sont lancées. En effet, si une guerre est juste, il n’y a pas lieu d’en interdire la pratique certains jours et si elle est injuste, elle doit être interdite, quel que soit le jour.
Finalement, les bases d’un État moderne ont été mises en premier par l’Église. Les trêves perdurent, notamment les trêves de Noël, qui sont occasionnelles et souvent locales car elles se négocient et ne peuvent s’imposer.
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